Les mesures barrières édictées par le gouvernement de la République dans la lutte contre la pandémie, doublée à la flambée du numérique, ont favorisé la montée en puissance de réseaux de prostitution et de proxénétisme.
« nemo censetur ignorare lege », autrement dit, « Nul n’est censé ignorer la Loi ». Cet adage exprime une exigence juridique selon laquelle une personne ne peut plaider devant un juge son ignorance de la loi. Au Cameroun, le premier alinéa de l’article 343 du Code pénal stipule que, « est punie d’un emprisonnement de six (06) mois à cinq (05) ans et d’une amende de vingt mille (20.000) à cinq cent mille (500.000) francs, toute personne de l’un ou de l’autre sexe qui se livre habituellement, moyennant rémunération, à des actes sexuels avec autrui ». Le deuxième alinéa renchérit : « est puni des mêmes peines celui, en vue de la prostitution ou de la débauche, procède publiquement par des gestes, paroles, écrits ou par tous autres moyens, au racolage de personnes de l’un ou de l’autre sexe ». Le constat est clair. Le législateur camerounais a tout prévu. Quoique nouveau, le monde du numérique est sous le contrôle de la Loi. « Sex-girls », travailleuses du sexe et leurs clients qui croyaient trouver sur Internet une terre fertile pour leur business n’ont qu’à bien se tenir. Face à la dureté de la Loi, celle de la peau de l’habitude restera anecdotique.
Usant parfois de faux profils sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, WhatsApp ou encore Snapchat, de jeunes prostituées, encore appelées « vendeuses de piments », emploient des techniques de webmarketing pour attirer la clientèle. A travers des groupes privés créés pour recruter les clients potentiels, elles vendent leurs charmes. En parcourant naïvement son fil d’actualité sur les réseaux sociaux au Cameroun, il est devenu fréquent de tomber sur des annonces proposant d’intégrer des groupes dédiés au commerce du sexe. La forte pénétration des smartphones, ajoutée au confinement imposé par la crise sanitaire de COVID-19, a boosté l’offre en matière de prestations sexuelles en ligne. Il est plus facile pour une travailleuse du sexe ou un client de trouver satisfaction sans devoir essuyer le regard de l’autre dans des lieux plus classiques. « Pour moi, c’est plus discret de solliciter des services sexuels sur les réseaux sociaux. Je n’ai plus à écumer les trottoirs pour satisfaire mes besoins. Depuis mon domicile, je passe ma commande en quelques clics », confie un client ayant requis anonymat. « C’est effectivement l’une des raisons pour lesquelles ce type d’activité prospère », justifie un psychosociologue. Pour cet expert, l’apparition des téléphones intelligents et des réseaux sociaux a modifié les comportements et les manières d’agir. Pour ce qui est de la prostitution en ligne, il faut savoir que les principaux facteurs sont la pauvreté et le sous-emploi. Cette situation entraîne une perte d’espoir et une baisse de l’estime de soi. Et comme on peut se prostituer sur les réseaux sociaux sans être stigmatisé, sans être forcément vu, beaucoup s’y adonnent pour gagner leur vie et s’affirmer en société, conclut l’expert. Seulement, même en ligne, l’activité n’est pas sans risques.
Le risque d’arnaque est fortement élevé. La forte demande amène certains à se faire passer pour des prostituées seulement pour escroquer en ligne. « Derrière certains comptes se cachent des hommes. Ils vous enverront des images qui ne sont pas d’eux et exigeront des paiements avant prestation. D’autres sont de fausses prostituées qui vous feront miroiter mille plaisirs et qui disparaîtront une fois qu’elles auront pris votre argent. Mais la véritable explication reste l’instabilité de l’environnement socioéconomique », détaille l’expert pour montrer que si les adeptes de ces pratiques, vielles comme le monde, ne sont pas frappés par la loi, d’autres prédateurs donnent un goût amer à leurs plaisirs.