Fort de cette réalité, le gouvernement confesse lui-même que « l’analyse de l’évolution des dépenses de personnel au cours des 10 dernières années a permis de relever que la masse salariale effectivement payée aux agents publics dans le budget de l’Etat croit annuellement de 5,6% en moyenne, malgré les multiples actions d’assainissement du fichier solde de l’Etat ». Et de poursuivre : « cette progression a été déjà relevée dans l’étude réalisée en 2018 sur la soutenabilité de la masse salariale, qui avait établi, par ailleurs, que l’augmentation des effectifs est la principale source d’accroissement de la masse salariale. Cette augmentation résulte du niveau très élevé des recrutements au cours des dix dernières années, en comparaison avec les départs à la retraite ».
Mieux, le gouvernement camerounais, qui a lancé en 2021 la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement 2020-2030, laquelle ambitionne de transformer structurellement l’économie camerounaise, révèle que l’étude sus-mentionnée a également « permis de mettre en lumière la réduction drastique des effectifs dans certains corps de métiers des secteurs productifs, à l’instar du secteur agro-pastoral, du secteur minier, du secteur des télécoms, de la santé, ainsi que la traduction et l’interprétariat ».
Explosion des affectifs des enseignants
Mais, à l’opposé, apprend-on, des recrutements massifs ont été effectués dans le corps des enseignants du secondaire, lesquels ont fait exploser la masse salariale au cours de la période sous-revue. « En passant de 30 640 à 83 308 entre janvier 2010 et juin 2020, les effectifs des enseignants du secondaire se sont multipliés par 2,7. Ils représentent désormais 34,4% des effectifs de la fonction publique, alors qu’ils n’en représentaient que 15,8% au début de l’année 2010. De même, leur masse salariale représente 32,3% contre 21% en 2010 », souligne le gouvernement.
Fort de cette réalité, révèlent les mêmes sources, le Cameroun, depuis 2011, n’a jamais respecté le ratio de soutenabilité de la masse salariale fixé à un maximum de 35% dans le cadre des critères de surveillance multilatérale édictés par la Cemac. En effet, au Cameroun, ce ratio, qui fait le rapport entre le volume des recettes fiscalo-douanières collectées au cours d’une année et les dépenses de personnel de l’Etat, a par exemple culminé à 36,5% en 2019.
Il s’agit pourtant de la meilleure performance réalisée par le pays au cours des 10 dernières années, en raison certainement des premières retombées du comptage physique des personnels de l’Etat (Coppe). Cette opération a permis d’extirper de nombreux agents fictifs du fichier solde de l’Etat, concourant ainsi à des économies de 30 milliards de FCFA en moyenne par an sur la masse salariale des agents publics. Pour le reste de la période sous revue, le ratio de soutenabilité de la masse salariale de l’Etat du Cameroun a toujours dépassé 40%, avec un pic de 44,4% au cours de l’année 2011.
S’exprimant le 25 novembre 2020 devant les députés, dans le cadre de la présentation du programme économique, financier, social et culturel du gouvernement pour l’année 2021, le Premier ministre (PM) camerounais, Joseph Dion Nguté, a révélé que le Trésor public a réalisé des économies de 40 milliards de FCFA sur la masse salariale de l’État, au cours de l’année qui s’achève.
Ces économies, a-t-on appris, sont consécutives à certaines actions implémentées par le gouvernement, pour assainir le fichier solde de l’État. Concrètement, il s’agit, a cité le PM, du paiement individualisé des salaires des agents publics et la dématérialisation des bulletins de solde, encore appelés « bons de caisse ».
En effet, le 14 août 2020, le ministre des Finances a officiellement lancé le paiement des salaires via le Système de télécompensation en Afrique centrale (Systac), piloté par la banque centrale. Ce système permet au Trésor public d’approvisionner directement le RIB du bénéficiaire de la solde ou de la pension, à l’opposé de l’ancien, baptisé Système de gros montants automatisé (Sygma).