Vendredi dernier à Yaoundé, le ministre délégué à la présidence de la République chargé de la défense Joseph Beti Assomo était face aux députés de la nation. Il a indiqué que le Cameroun va désormais produire ses propres munitions. Et l’usine dédiée à cela sera implantée dans la ville de Garoua située au Nord du pays. Le membre du gouvernement n’a pas donné d’autres informations sur ce projet.
« Les diligences foncières et domaniales sont déjà terminées ; le terrain a été identifié et limité. Et nous sommes en négociation avec nos partenaires turcs avec lesquels nous allons travailler pour que ce projet devienne une réalité », a indiqué le ministre de la Défense, qui précise que l’usine de Garoua permettra de produire aussi bien les munitions de guerre que les munitions pour fusils de chasse.L’usine en gestation devrait permettre de réduire considérablement les dépenses relatives aux achats de munitions, qui se font jusqu’ici auprès de sociétés étrangères. Ce projet a été évoqué pour la première fois dans la presse en fin février 2016, lors de la visite d’une délégation turque dans le pays. Mais il n’est pas exclu que le groupe de travail mis en place en début d’année 2022 par le ministre de la Défense à l’effet de réfléchir au développement des capacités militaro-industrielles de l’armée camerounaise contribue à sa maturation.
« Les forces de défense et de sécurité jouent un rôle pivot dans le processus permettant à un pays de muscler […] les filières industrielles dans la marche vers l’émergence économique », avait rappelé le ministre Beti Assomo aux membres du groupe de travail présidé par le chef d’État-Major des armées, le Général René Claude Meka.
En dépit de cela en poussant la réflexion sur le lieu de l’implantation de cette usine de productions de munitions, on peut penser que la ville de Garoua a été choisie du fait de l’insécurité vécue dans la partie septentrionale du Cameroun. Rappelons que depuis le mois de mars 2014 la secte Boko Haram a multiplié ses attaques dans les villages de l’Extrême-Nord du pays. On a d’abord noté des incursions, des raids meurtriers, des kidnappings. Ensuite au fil des mois, les Djihadistes ont lancé des attaques planifiées contre l’armée camerounaise dans ladite région. Les violences de Boko Haram au Cameroun ont déclenché une crise humanitaire majeure, forçant des centaines de milliers de personnes à quitter leurs foyers depuis 2014. L’armée camerounaise a déployé des milliers de soldats dans la région de l’Extrême-Nord pour prévenir et repousser les attaques de Boko Haram. Mais la menace court toujours.
Régler la question autour de la circulation des armes
La Commission de l’Union africaine estime qu’au moins 120 000 armes légères et de petit calibre sont en circulation illégale au Cameroun, notamment des revolvers, des pistolets, des fusils, des fusils d’assaut et des mitrailleuses. Cependant, selon les données fournies par Paul Atanga Nji en 2021, ministre de l’Administration territoriale, le gouvernement n’a accordé que 3 800 autorisations de port de munitions de petit calibre. L’implantation de cette nouvelle usine prochaine devrait pousser le gouvernement à être extrêmement vigilant sur la circulation des munitions et donc des armes, à travers la production des premières.