L’artémisinine extraite de cette plante présente plusieurs applications en médecine, dont celle contre le coronavirus. Depuis peu de temps, la plante est au cœur de toutes les convoitises. Enquête.
A Madagascar, une boisson appelée Covid-Organics, élaborée par l’Institut malgache des recherches appliquées, à base de feuilles séchées d’artemisia est officiellement présentée par le président Andry Rajoelina, comme « remède malgache contre le COVID-19 ». Les livraisons vont d’ailleurs bon train à travers le continent.
L’artemisia n’est pas une plante inconnue. Elle est utilisée depuis plus de deux mille ans dans la médecine chinoise et a un effet prouvé pour lutter contre les maladies parasitaires du sang, notamment le paludisme. Le genre Artemisia, les armoises, regroupe des herbacées, des arbrisseaux et des arbustes, généralement aromatiques, densément tomenteux, pubescents ou glabres, de la famille des astéracées. Leurs feuilles, sont pennées. Les armoises ont notamment des propriétés diurétiques. Au cœur de la crise sanitaire de COVID-19, l’artémisinine de la variété artemisia annua est à l’origine d’un traitement contre le virus.
L’artemisia annua
Ses feuilles contiennent une molécule, artémisinine, qui a pour effet de soulager les fièvres dues aux crises de paludisme. Originaire d’Asie tempérée, et cultivée dans le monde, Madagascar en est le premier exportateur mondial. Environ 10 000 paysans malgaches la cultivent. Plante aux fleurs jaunes et au parfum de camphre, elle réduit aussi les symptômes des insolations, maux de tête, et agit sur les troubles intestinaux.
Depuis les années 2000, la Chine a conduit de nombreuses études statistiques contrôlées pour évaluer l’efficacité de l’association de sa médecine traditionnelle à la médecine conventionnelle. Elles ont été réalisées dans les plus grands centres universitaires, de façon rigoureuse, pendant l’épidémie de Sras de 2003. L’artemisia annua fait partie des deux plantes les plus efficaces contre le Sras, avec le lycoris radiata. Et c’est tout naturellement qu’elle a été de nouveau prescrite officiellement contre le Covid-19 dès décembre 2019, en association avec d’autres plantes, mais elle a toujours été prise à distance de celles-ci et dans les cas présentant des signes pulmonaires.
Artemisia et COVID-19
85 % des patients chinois positifs au Covid-19 et symptomatiques ont reçu des mélanges de plantes en association avec les thérapeutiques conventionnelles. Les études réalisées, qui sont en cours de publication, montrent que les patients guérissent statistiquement plus rapidement lorsqu’ils ont pris les plantes que les patients traités seulement de façon conventionnelle.
La posologie vient de la médecine traditionnelle chinoise. Dans le cas du Covid-19, elle indique 400 ml de décoction contenant 10 à 12 g de feuilles et tiges d’artemisia annua sèche par jour, soit deux poignées pour la quantité d’eau fixée. Pour être efficace, la préparation doit être réalisée chaque jour et être consommée dans les 24 heures. Le traitement démarre dès les premiers signes de la maladie et doit être poursuivi pendant la durée des symptômes. Une prise précoce permettrait peut-être d’éviter des complications conduisant à une hospitalisation, voire au passage en réanimation. En plus, l’artemisia annua est bon marché, sans toxicité et sans effets indésirables. Elle est juste un peu amère. Par ailleurs, la culture locale de cette plante pourrait constituer une source de revenus durables au bénéfice de petits producteurs, donc de nombreuses familles.
La position de l’OMS
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) reconnaît que la médecine traditionnelle, complémentaire et alternative recèle de nombreux bienfaits. L’Afrique a d’ailleurs une longue histoire de médecine traditionnelle et de tradipraticiens de santé qui jouent un rôle important dans les soins aux populations. Des plantes médicinales telles que l’artemisia annuasont considérées comme des traitements possibles de la Covid-19, mais des essais devraient être réalisés pour évaluer leur efficacité et déterminer leurs effets indésirables. Les Africains méritent d’utiliser des médicaments testés selon les normes qui s’appliquent aux médicaments fabriqués pour les populations du reste du monde. Même lorsque des traitements sont issus de la pratique traditionnelle et de la nature, il est primordial d’établir leur efficacité et leur innocuité grâce à des essais cliniques rigoureux.