La sentence frauduleusement obtenue s’appuie sur la décision rendue le 10 novembre 2020 par la Chambre de commerce et d’industrie en France, elle-même objet d’un recours en annulation devant la Cour d’Appel de Paris. Jouissant d’une immunité qui protège la fortune publique qu’il gère contre les atteintes des tiers, Cyrus Ngo’o, le directeur général du Port autonome de Douala (PAD), rappelle que les auteurs, complices ou receleurs d’atteintes à cette fortune s’exposent à des poursuites et sanctions judiciaires en vigueur. Selon l’article 30 de l’acte uniforme OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution, les entreprises publiques, quelles qu’en soit la forme et la mission, bénéficient du principe général de l’immunité accordée aux personnes de droit public. Cette immunité constitue un obstacle procédural d’ordre personnel qui empêche le créancier d’atteindre le patrimoine de sa débitrice personne publique.
Fort de cette disposition, le directeur général du PAD tient à réitérer ses remerciements à son aimable clientèle et à ses nombreux partenaires qui ont fait confiance à l’expertise camerounaise dans la gestion et l’exploitation de son terminal à conteneurs, véritable fierté du Cameroun. Si le législateur OHADA range les personnes morales de droit public originaires et les entreprises publiques parmi les bénéficiaires de l’immunité d’exécution, l’application de ce principe pose des problèmes pratiques variés. En effet, l’immunité d’exécution est une sorte d’insécurité juridique de nature à fragiliser des relations d’affaires entretenues avec les personnes publiques. La compensation ne peut à elle seule résoudre les difficultés de recouvrement causées par l’immunité d’exécution.
S’agissant des entreprises publiques, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) a eu à poser le principe même de la reconnaissance à celles-ci de l’immunité d’exécution nonobstant toutes dispositions. Il en résulte littéralement que les personnes publiques ne peuvent subir des procédures d’exécution forcées ou des mesures conservatoires telles que réglementées par l’Acte Uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution. En résumé peu importe que l’entreprise soit soumise au régime de droit privé ; elle bénéficie de l’immunité d’exécution dès lors que son activité est d’intérêt général, que son capital social est détenu par les personnes publiques et que ses ressources sont publiques.
La CCJA, répondant à la question de droit en cause, a décidé que les entreprises publiques, quelles qu’en soient la forme et la mission, bénéficient du principe général de l’immunité d’exécution accordée aux personnes morales de droit public. Il en est ainsi, même si la loi de l’Etat partie où est domiciliée l’entreprise concernée en dispose autrement. Les personnes publiques sont l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que les établissements publics constitués en organisation de l’action publique. Quant aux entreprises publiques ou personnes morales, elles disposent d’un patrimoine distinct dont l’origine et l’importance restent très variables.
Ce patrimoine comprend un actif composé notamment des propriétés mobilières et immobilières et un passif composé des dettes, notamment celles contractées par ces entités à l’occasion de leur activité, ce qui les rend débiteurs vis-à-vis des tiers créanciers. Il se pose alors la question de savoir si le créancier de ces entités peut les contraindre à s’exécuter. La fraude consiste à dire que la sentence est définitive alors qu’elle ne l’est pas, car il y a un recours en annulation et il y a une assignation en annulation de la formule exécutoire et en rétractation de l’ordonnance d’exequatur.