Il s’agit d’un secret de polichinelle. Le pays de Paul Biya compte 369 partis politiques ayant existence légale. En fin de semaine dernière, le gouvernement a dévoilé la liste des derniers venus. 40 nouvelles formations font leur entrée dans le champ politique camerounais. Elles sont agréées pour « enrichir le débat politique et encourager l’expression des libertés ». Le rôle des 37 nouveaux partis d’expression française et des trois d’expression anglaise, est de participer à l’animation « d’un débat politique contradictoire et constructif ». Ainsi a précisé ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji.
Avant ces partis politiques, 329 autres sont enregistrés dans le fichier politique national. Ils sont agréés au fil du temps, depuis le retour au multipartisme en 1990 pour jouer le même rôle et apporter la même contribution. Toutefois, les formations politiques qui se démarquent par leurs performances et leur activité sur le terrain sont une dizaine à peine.
À l’Assemblée nationale, seuls huit partis sont représentés. À l’issue des élections législatives du 09 février 2020, le RDPC a remporté 152 sièges, l’UNDP 07, le SDF 05, le PCRN 05, l’UDC 04, le FSNC 03, le MDR 02 et l’UMS 02. Au Sénat, outre le RDPC qui occupe 95% de sièges, il faut ajouter l’ANDP, le MDR, l’UPC, le SDF et l’UNDP. La réalité est presque la même pour ce qui est des municipales et régionales.
C’est que, en dehors du RDPC qui est implanté dans tous les arrondissements des 10 régions, les autres partis ont une présence encore réduite. Certaines ont une base communale, régionale, ou encore influencent dans deux à quatre régions. Quelques-uns restent présents dans un cercle amical ou familial. Tous sont plus ou moins actifs à l’approche des échéances électorales. C’est aussi à cette période que plusieurs voient le jour.
Ainsi, cette multiplication de formations politiques est plutôt défavorable à l’opposition qui continue de s’émietter. Des partis se vident de leurs cadres influents lorsqu’ils ne se divisent pas en plusieurs factions. Ce qui contribue à les fragiliser davantage face au parti au pouvoir qui travaille à consolider son leadership chaque jour.
En 2017, le pays alignait environ 300 formations politiques pour moins de 25 millions d’habitants. Question simple : quel est le rôle des partis politiques ? La réponse la plus simple que l’on trouve dans les dictionnaires spécialisés en la matière, c’est qu’ils participent à l’animation de la vie politique. Dans le cas spécifique du Cameroun, l’article 3 de la Constitution précise que « les partis et formations politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils doivent respecter les principes de la démocratie, de la souveraineté et de l’unité nationales. IIs se forment et exercent leurs activités conformément à la loi ». Cette loi, c’est celle N°90/056 du 19 décembre 1990 portant sur la création des partis politiques qui, en son article premier, reprend les dispositions constitutionnelles ci-dessus. Cette loi promulguée à la fin de l’année 1990, a vu les premières formations politiques apparaître quelques mois plus tard. Rien que pour la seule année 1991, 57 partis politiques ont été légalisés, comme on peut le découvrir dans le dernier ouvrage de Bernard Messengue Avom publié en 2017 aux Editions CLE : « La représentation politique au Cameroun : Genèse et particularités ». II faut d’ailleurs souligner que cette année-là est aussi celle qui a vu naître le plus de formations politiques au Cameroun. Preuve sans doute de l’aspiration des Camerounais à exprimer librement leurs opinions et à ne plus prendre le maquis pour le faire, comme l’avait souhaité quelques années auparavant, le président de la République, Paul Biya. Aujourd’hui, le pays dépasse la barre des 300 partis politiques officiellement légalisés. Un record qui traduit sans doute la soif des Camerounais de faire valoir leurs idées à travers ces regroupements.