En 2016, Boko Haram s’était scindé en deux groupes : d’un côté le groupe Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap) et de l’autre, une faction historique toujours dirigée par Abubakar Shekau. Plusieurs dizaines de véhicules armés et de nombreuses motos conduites par les hommes d’Iswap ont pris d’assaut, le 20 mai, le bastion d’Abubakar Shekau situé à la Sambisa, dans le nord-est du Nigéria. Acculé, celui-ci se serait tiré une balle dans la poitrine pour échapper à ses rivaux, prêts à le capturer. D’autres sources affirment qu’il a activé une ceinture d’explosifs.
Depuis 2016, deux groupes djihadistes rivaux se partagent de larges pans du nord-est du Nigeria et des localités dans les Etats voisins. D’un côté, le groupe Boko Haram, dont l’insurrection a débuté en 2009, contrôle la forêt de Sambisa et une partie de l’Extrême-Nord du Cameroun. Il a également des cellules dans la région du lac Tchad, du côté du Niger. De l’autre, l’Iswap s’est établi dans la forêt d’Alagarno et sur les pourtours du lac Tchad (Nigeria, Tchad et Niger). Les deux organisations, qui formaient un seul groupe avant la scission en 2016, mènent en priorité des attaques contre les armées de la région, mais des combats sporadiques ont lieu entre elles.
Selon des sources proches des services de renseignement, de premiers affrontements entre l’Iswap et Boko Haram ont commencé en avril, au lac Tchad. Des éléments de Boko Haram ont tendu une embuscade à des combattants d’Iswap. Des armes ont été saisies, et plusieurs membres d’Iswap tués. En représailles, le 9 mai, l’Iswap a lancé une attaque contre un camp de Boko Haram situé sur le lac Tchad, côté Niger. Les groupes ont subi d’importantes pertes, et l’Iswap a décidé de poursuivre l’affrontement en allant attaquer Boko Haram jusque dans son bastion.
Si plusieurs sources doutent fortement que Shekau ait pu survivre à ses blessures, il n’est pour l’instant pas possible d’affirmer qu’il est mort. Le porte-parole de l’armée nigériane a simplement indiqué : « Nous sommes en train d’enquêter ». « Seuls ses proches peuvent nous donner une information définitive sur son état », a indiqué une source proche des renseignements. Pour l’heure, ni l’Iswap ni Boko Haram n’ont communiqué.
Une certitude : les djihadistes ont pour politique d’éviter un vide au sommet du pouvoir en nommant un successeur une fois qu’un chef meurt ou est destitué. « Le fait que Boko Haram n’ait pas nommé le successeur de Shekau est une forte indication qu’il n’est pas encore mort », selon l’une de ces sources. En plus de dix ans de conflit dans le nord-est du Nigeria, le décès d’Abubakar Shekau a été annoncé au moins cinq fois. Depuis le 20 mai, son état de santé fait une nouvelle fois l’objet de spéculations.