L’époque où le Groupement inter-patronal du Cameroun (GICAM) et l’exécutif rivalisaient d’amabilités, au cours de leurs rencontres, semble révolue. L’affaire née du rendez-vous manqué entre le GICAM et le ministre d’Etat, ministre de la Justice (Minjustice), garde des Sceaux, Laurent Esso continue d’alimenter les débats tout en soulevant de multiples interrogations. Empêché pour la rencontre d’échanges avec les opérateurs économiques, prévue le 16 avril, au siège du GICAM à Douala, le Minjustice a saisi par écrit le patronat pour annoncer la venue d’une délégation dirigée par le ministre délégué, Jean de Dieu Momo. Y faisant suite, Célestin Tawamba, le président du GICAM a opposé une fin de non-recevoir. « Nous sommes dans le regret de ne pas pouvoir accueillir la délégation qui est annoncée dans votre correspondance », a-t-il répliqué, précisant que son mouvement est disposé à accueillir le Minjustice à une prochaine date.
Si l’on peut comprendre que le GICAM avait souhaité échanger directement et prioritairement avec le GICAM, pourquoi ne pas avoir accueilli la délégation dépêchée par le membre du gouvernement ? Le GICAM aurait-il considéré ladite délégation au rabais ? Le ministre délégué auprès du Minjustice est-il moins membre du gouvernement ? Quel levier aurait activé le GICAM pour juger des capacités de la délégation dépêchée par le Minjustice ? Les réponses pertinentes à ces questions laissent croire que la sortie de Célestin Tawamba était plutôt maladroite. Le président de la plus importante organisation patronale au Cameroun a, depuis lors, redonné de la pesanteur au climat déjà délétère du fait des rapports particulièrement tendus avec la direction générale des Impôts (DGI).
Les 15 et 19 février, Modeste Mopa Fatoing, le directeur général des Impôts séjournait à Douala afin de présenter aux opérateurs économiques les contours des nouvelles mesures fiscales contenues dans la loi de Finances de l’année 2021. Alors qu’environ 250 entreprises ainsi que les regroupements socio-professionnels ont pris part aux travaux, de l’avis des organisateurs, Célestin Tawamba a brillé par son absence. Dans les couloirs, il se susurre que les patrons de la DGI et du GICAM sont en « guerre ». Résultat des courses : le succès proclamé par la DGI est d’ailleurs nuancé. Les absences du GICAM tout comme celles des principales entreprises basées dans la ville de Douala ne sont pas passées inaperçues.
Si les dissensions entre le patronat et la DGI sont aussi vieilles que le monde, la situation au Cameroun revêt un tout autre sens. Les incompréhensions semblent désormais dépasser le cadre institutionnel pour se déporter sur les personnes. Et la réélection du président du GICAM, le 16 décembre 2020, tout comme le maintien du directeur général des Impôts à son poste malgré les appels à son limogeage, ont d’avantage contribué à perpétuer le climat de tension. A-t-on assisté, le 15 avril, dernier aux métastases de ce conflit ? Quoi qu’il en soit, l’intérêt général devrait très vite prendre le dessus au moment où le gouvernement compte sur le secteur privé pour relancer la croissance durablement affectée par les effets de la crise de COVID-19.