L’ancien Premier Ministre originaire du Nord-Ouest, a été nommé par le Président de la République le 17 avril 2020. Après dix ans à l’immeuble étoile, il remplace Peter Mafany Musongue à ce poste.
Philémon Yang ne fait d’ombre à personne, et c’est sans doute le secret de sa longévité. Premier ministre depuis en dix années, il sait évoluer en eau trouble. Portrait d’un homme qui a fait de la discrétion une technique de survie.
En ce 20 mai 2018, alors que Paul Biya ouvre les portes du palais présidentiel d’Etoudi à l’occasion de la fête nationale, une pluie battante tombe sur Yaoundé. Mais diplomates, entrepreneurs, hommes politiques, intellectuels ou sportifs ont fait le déplacement. Philémon Yang aussi. Nommé le 30 juin 2009, le Premier ministre est un habitué de l’exercice. Il vit en cette fin d’après-midi pluvieuse sa neuvième fête nationale en tant que numéro un du gouvernement.
À quoi pense-t-il donc ? On dit cet homme de 71 ans dénué d’ambition, au service exclusif d’un président dont il a été le directeur de campagne lors de la présidentielle de 2011. Alors que se profile un nouveau scrutin pour la magistrature suprême, en octobre, la situation n’a guère changé : Philémon Yang servira Paul Biya, d’une main discrète mais ferme. Il ne manque en tout cas pas d’atouts. « Il est très prudent et a appris de ses prédécesseurs », confie un proche.
Il a appris des autres
Simon Achidi Achu (1992-1996) aimait serrer les mains et battre la campagne. Philémon Yang est un technocrate qui aime rester au plus proche de ses dossiers. Sadou Hayatou (1991-1992) était un politique ambitieux. Yang a appris à s’effacer derrière les réels tenants du pouvoir au pays de Paul Biya, qu’ils résident au secrétariat général de la présidence ou au cabinet civil.
Philémon Yang a-t-il en tête le sort d’Ephraïm Inoni, un autre titulaire du poste (2004-2009), condamné en 2012 à vingt ans de prison pour détournement de fonds publics dans la gestion de Cameroon Airlines ? Il a bien été président du conseil d’administration de Camair-Co (qui a succédé à Camair) de 2008 à 2013, mais les déboires de cette dernière (21 millions d’euros de pertes pour l’exercice 2011-2012) ne l’ont guère atteint et il finira par en démissionner, à la demande d’un Paul Biya soucieux de le tenir à l’abri du soupçon.
De plus, Philémon Yang le sait : mieux vaut ne pas se frotter au ministre de la Justice, Laurent Esso, grand ordonnateur de l’opération anticorruption Épervier. Le « premier des ministres », comme on le surnomme parfois, sait se tenir à distance respectueuse des dauphins putatifs du chef, qu’ils se nomment Laurent Esso, René Emmanuel Sadi, désormais ministre de la communication, ou Louis-Paul Motaze, aujourd’hui aux Finances.
Première apparition post-remaniement
Après le réaménagement du 4 janvier 2019, il a fait sa première apparition samedi 23 février 2019 à Abong-Mbang, lors du meeting de remerciements des populations de la région de l’Est au Chef de l’Etat après la nomination et le maintien des fils de cette région au sein du gouvernement de son successeur Joseph Dion Nguté. C’était sa première apparition publique de celui qui a été Premier Ministre, Chef du gouvernement pendant près de dix ans, depuis son départ de l’immeuble étoile, le 8 janvier dernier après la passation de pouvoir à son remplaçant Joseph Dion Nguté. Cette présence remarquée et remarquable de l’ex-premier ministre a été salué par le Ministre de la fonction publique et de la réforme administrative. « Merci au PM, Philémon YANG d’être venu rehaussé de sa présence l’éclat de notre meeting », a écrit Joseph Anderson Lé sur son compte twitter.
Ce meeting a été ponctué par des offices traditionnels et religieux. « L’homme n’est pas un oiseau qui passe sans laisser de trace. Votre passage au gouvernement doit laisser des traces à l’Est », dixit Mgr Yan OZGA, évêque du Diocèse de Doume-Abong Mbang au différents fils de l’Est présent dans le gouvernement du 4 janvier 2019.
Rebondissement aux ordres nationaux
Philémon Yunji Yang vient d’être nommé vendredi dernier Grand chancelier des ordres nationaux. Cette fonction équivaut au statut de ministre d’État. La grande chancellerie des ordres nationaux est l’organe qui réceptionne les dossiers de candidatures à une distinction honorifique envoyés par les ministres compétents. Ses membres composent le conseil de l’ordre.
Philémon Yunji Yang est né le 14 juin 1947 à Jiketem-Oku (département de Bui dans la région du Nord-Ouest). Il a occupé le poste de Premier ministre entre 2009 et 2019. Il a conduit 4 gouvernements entre le 30 juin 2009 et le 4 janvier 2019. Philémon Yang est membre du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). C’est un ancien magistrat de formation et diplomate anglophone de carrière. Depuis 1998, la Grande chancellerie est un service rattaché à la présidence de la République.
Cette nomination intervient après la session du conseil des ordres nationaux du 14 au 16 avril. Le nouveau Grand chancelier doit aussi mettre en œuvre le nouveau cadre juridique. Le 26 décembre dernier, le Chef de l’État a signé deux décrets. Un premier décret a réorganisé la Grande chancellerie. Le second, quant à lui, réorganisait les conseils des Ordres Nationaux et des commissions des médailles de la république. Il s’agit de textes d’application de la loi portant régime des ordres nationaux adopté lors de la session parlementaire de mars 2019.
Les missions clarifiées
Ces textes ont surtout renforcé l’importance opérationnelle de la Grande Chancellerie. Les insignes de commandeurs et de grands officiers dans l’ordre de la valeur, ainsi que celle du Grand cordon du mérite camerounais sont remis par la Grande chancellerie en cas empêchement du président de la République. La Grande chancellerie des Ordres nationaux préside aussi les conseils de l’ordre et les commissions des médailles de la république. Elle administre donc les ordres et les médailles, en signant les brevets des distinctions, entre autres.