Le Nigeria encore mécontent après la rétrocession de la péninsule de Bakassi au Cameroun. Dans une vidéo qui fait le tour de la toile depuis quelques jours, des personnalités nigérianes, exhortent le président nigérian Muhammadu Buhari à récupérer la péninsule de Bakassi. Au premier plan de cet appel, le gouverneur de l’Etat de Cross River, Ben Ayade. Ce dernier est aussi un ancien ministre.
L’appel à Buhari est lancé depuis le 18 août 2020. C’était au cours d’une visite de ces hommes politiques dans la zone frontalière avec le Cameroun. De l’avis de ces hommes politiques, le Cameroun n’a pas respecté plusieurs termes des accords de Greentree. Ils affirment aussi, que Yaoundé a abandonné les populations qui vivent à Bakassi. Le gouvernement camerounais n’a pas encore fait une sortie après cette attitude des hommes politiques nigérians.
Yaoundé récupère la pleine souveraineté de l’Ile en 2008
Le Cameroun a pris, mercredi 14 août 2008, la pleine possession de la péninsule de Bakassi, proche du delta du Niger. Celle-ci était auparavant sous administration transitoire, depuis l’accord, par lequel le Nigeria avait formellement remis le territoire aux autorités camerounaises, après quinze ans de conflits frontaliers. La péninsule de Bakassi appartient, pleinement au Cameroun depuis 12 ans. L’Ile compte environ 40 000 habitants, dont de nombreux Nigérians.
« Durant les cinq années qui viennent de s’écouler, la population a eu l’occasion de se familiariser avec l’administration camerounaise, bénéficiant d’un régime dans lequel les règles liées à la nationalité camerounaise et au statut d’étrangers au Cameroun n’étaient pas strictement appliquées », avait expliqué la CRTV à l’époque.
Dès 1994, Bakassi avait été au centre d’un contentieux entre le Cameroun et le Nigeria devant la Cour internationale de justice (CIJ). Les deux pays revendiquaient la souveraineté de cette région de 1000km² au fort potentiel pétrolier, gazier et de ressources halieutiques. La CIJ avait finalement tranché en faveur du Cameroun en octobre 2002. Proche du delta du Niger, la péninsule est également essentielle dans le contexte de lutte contre la piraterie. Attaquée plusieurs fois par des pirates nigérians, dont certaines ont abouti à des prises d’otages ou des morts, elle accueille aujourd’hui cinq bases militaires camerounaises ainsi que les forces du bataillon d’intervention rapide (BIR).
Pour rappel, Bakassi est l’extension de la péninsule de Calabar dans le golfe de Guinée. Précédemment administré par le Nigeria, un jugement de la Cour internationale de justice de La Haye, rendu le 10 octobre 2002, attribue la souveraineté du territoire au Cameroun. Il se base sur le traité signé en 1913 entre les deux puissances coloniales de l’époque dans la région, la Grande-Bretagne, qui occupait le Nigeria et l’Allemagne qui occupait le Cameroun. Le retrait du Nigéria s’est déroulé sans heurts à la date prévue. Les deux pays, par l’intermédiaire de leur ministre de la Justice, avaient paraphé le jeudi 14 août 2008 l’accord de rétrocession à Calabar, capitale de l’État nigérian de Cross River, dont dépendait Bakassi.
En 2005, le Cameroun négociait l’exploitation du pétrole de Bakassi
«Je rentre confiant. Nous avons fait un pas en avant pour sortir de l’impasse et progresser vers un règlement pacifique du conflit. Tout le monde, y compris le Nigeria, reconnaît la souveraineté du Cameroun sur la péninsule de Bakassi.» Le président camerounais Paul Biya avait tout lieu d’être satisfait, à Genève en mai 2005, au sortir du mini-sommet organisé au Palais des Nations par l’ex secrétaire général de l’ONU, le défunt Kofi Annan, pour lui et son homologue nigérian de l’époque Olusegun Obasanjo. C’est que, même si des troupes nigérianes occupent toujours les 1000 km2 de ce territoire camerounais potentiellement riche en pétrole situé au fin fond du golfe de Guinée, le processus de règlement du différend frontalier qui opposait Yaoundé à Abuja depuis une quinzaine d’années avait été relancé.
A l’origine de cette quatrième rencontre entre les deux présidents, depuis que la Cour internationale de justice (CIJ) a, en octobre 2002, attribué au Cameroun le territoire contesté, Kofi Annan s’était félicité de la décision des deux chefs d’Etat d’accélérer le mouvement. C’est que, alors qu’en vertu du jugement de la CIJ et des accords bipartites qui l’ont suivi, les militaires nigérians auraient dû quitter la péninsule en septembre 2004, il n’en a rien été. Autre point d’achoppement: la démarcation de la frontière maritime entre les deux Etats qui était toujours au point mort.
«Les chefs d’Etat ont décidé que le processus devait être accéléré et que nous devions définir le nouveau tracé de la frontière maritime», déclarait alors à l’époque Kofi Annan, arrivé de Moscou où il avait assisté aux cérémonies du 60e anniversaire de la capitulation allemande. Par ailleurs, il avait assuré que l’ONU participerait au contrôle du retrait des soldats nigérians de la péninsule de Bakassi une fois que la Commission mixte aurait arrêté le nouveau calendrier de ce retrait. Ce qui avait été fait en 2008.
Si, et on l’aura compris, les importantes réserves d’or noir, dont toute la région du golfe de Guinée est imbibée, sont à la source du différend frontalier nigéro-camerounais, l’origine historique de cette même frontière n’est pas inintéressante, et surtout pas sans conséquence sur la situation actuelle. C’est à la suite d’un accord signé en 1913 entre les deux grandes puissances coloniales de l’époque qu’étaient la Grande-Bretagne et le Reich allemand, que les frontières terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria ont été tracées. Longue de 1600 km, la démarcation terrestre entre les deux pays s’étendait, tout comme aujourd’hui, du lac Tchad à la péninsule de Bakassi.