Les experts pointaient notamment le financement de groupes armés grâce à leur trafic. Si les sanctions avaient été partiellement levées au cours des années, seules huit zones sur les 24 étaient autorisées à commercer le diamant. Aujourd’hui, les diamants en provenance de l’intégralité des régions du pays vont pouvoir être vendus à l’exportation.
« C’est d’abord un sentiment de justice pour le peuple centrafricain, déclare Rufin Benam Beltoungou, le ministre centrafricain des Mines. Il y avait deux principales conditions. Le retour de l’autorité de l’État en termes de sécurité sur l’étendue du territoire. Et une exigence minimale des règles du processus de Kimberley. Tout le gouvernement s’y était engagé, le chef de l’État a travaillé pour cela ».
« En tant que Centrafricain, c’est un sentiment de fierté », se réjouit Paul-Crescent Beninga, membre de la coalition pour la société civile du processus de Kimberley. Une levée de l’embargo particulièrement importante pour les populations dépendantes des activités minières, insiste-t-il. Cependant, la société civile devra être vigilante au respect des demandes faites par le processus de Kimberley.
« Il demande par exemple au gouvernement centrafricain, pendant toute l’année 2025, de venir présenter des données statistiques relatives aux transactions autour du diamant. Et nous allons y veiller pour que la République centrafricaine puisse respecter ces conditions-là. Également, nous allons veiller sur les questions de la transparence dans le processus d’extraction, de commercialisation et d’exportation », ajoute Paul-Crescent Beninga.
Le ministre alerte sur les cours du marché du diamant actuellement particulièrement bas. Les autorités espèrent cependant que la reprise de la production du diamant sur l’ensemble du territoire servira les caisses de l’État.
Réuni à Dubaï, en Arabie saoudite, le Processus de Kimberley (KP), l’organisme de régulation du commerce mondial du diamant, a procédé à la levée totale de la sanction. La Centrafrique plaidait depuis plusieurs mois pour cette levée totale de l’embargo en faisant valoir la normalisation de la situation sécuritaire et la conformité aux normes du KP visant à bloquer les « diamants de sang » issus des zones de conflits. Elle figure parmi les pays les plus pauvres au monde.
Entre 2015 et 2018 a été levée l’interdiction d’exportation prononcée en 2013 après le renversement du président François Bozizé par une coalition de rebelles en majorité musulmans, la milice Séléka. Mais les deux-tiers des vingt-quatre zones minières diamantifères répertoriées étaient encore sous sanction. Les riches gisements de diamants alluvionnaires constituent, avec l’or, une des ressources les plus précieuses de la Centrafrique, avec des permis d’exploitation et de recherche délivrés à des Chinois, des Américains, des Rwandais et des Russes liés au groupe privé paramilitaire Wagner.
En 2011, deux ans avant le coup d’Etat militaire qui a ensuite dégénéré en une interminable guerre civile, le pays exportait officiellement 323 575,30 carats de diamants pour un revenu de 29,7 milliards FCFA (environ 45 millions d’euros). En 2023, ce revenu était de 324,3 millions FCFA (496 000 euros), selon des chiffres officiels.