« Sénateur Ibrahim Mbombo Njoya, sultan roi des Bamoun. Au nom du président de la République, et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à la dignité de grand cordon du mérite camerounais à titre posthume ». Cette formule généralement prononcée dans de telles circonstances a été énoncé par le Premier ministre. Joseph Dion Ngute, en sa qualité de représentant personnel du chef de l’Etat a ainsi procédé à la décoration de cette « légende royale » lors de ses obsèques officielles, décrétés par Paul Biya, le samedi 9 octobre dernier à Foumban. Cette prise de parole du Premier ministre, chef du gouvernement, classée à la douzième des témoignages et lettres de condoléances, est close cette cérémonie d’hommage en la mémoire de cette « légende royale ». Diplomates, autorités traditionnelles et religieuses, associations sportives et culturelles, hommes politiques, parlementaires, membres du gouvernement ont salué la trajectoire et les œuvres du roi Bamoun. Les fils et filles du Noun, par la voix de Njoya Zakariaou, par ailleurs ministre délégué aux transports, ont décrit les qualités de « père de tous les enfants » après le « retournement du monarque à ses ancêtres ». « Bouclier, protecteur, pacificateur, homme de patience et de tolérance viscérale, rassembleur dans l’âme, homme de paix et d’action. Notre roi était et incarnait toutes ces valeurs. Il savait être à l’affut pour le rayonnement non seulement de son terroir mais être également pour le développement harmonieux et paisible de notre pays au travers de la pratique de la démocratie apaisée. Véritable patrimoine national, le sultan roi des Bamoun, a fait don de sa personne et de sa personnalité à son peuple, à son pays », a-t-il témoigné.
En larmes, les princesses et princes du roi ont magnifié un « modèle de bonté, de loyauté, d’honnêteté, de charité, de générosité et d’équité ». Malgré la douleur de la séparation, le prince Sadou Daoudou a dit leur engagement à garder et à respecter les recommandations de leur géniteur afin d’honorer sa mémoire en restant « ferme dans la croyance en Dieu, unis en tout temps et en tout lieu et aucune épreuve de la vie ne vienne perturber votre sérénité, qu’aucune méchanceté humaine ne vienne secréter en vous le venin de la haine et de la discorde », selon les prescriptions du disparu
Dans une atmosphère de deuil dominée par la compassion et le recueillement au « Village du Ngoun », lors des obsèques officielles du Sénateur Ibrahim Mbombo Njoya, le Dr Inoussa Ngoupayou, 1er adjoint sultan roi des Bamoun, a présenté les qualités de ce dernier décédé le 27 septembre dernier à l’hôpital américain de Paris. Ces valeurs caractéristiques des 29 ans de trône du 19ème roi de la dynastie Share Yen. « Nous perdons une boussole au sens propre du terme. Au firmament d’une carrière administrative, diplomatique, gouvernementale, politique et traditionnelle parsemée d’auréoles sportive et culturelle diverses. « Le sultan roi que nous pleurons ce jour fut un homme épris de paix et de dialogue social. Durant son règne, il a fait sien la pacifique cohabitation entre les religions monothéistes existant dans tout le département du Noun et entre les nombreuses ethnies installées sur son territoire traditionnel. Notre sénateur sultan roi est resté à l’écoute de ses populations. Toujours le cœur ouvert et la main tendue à son prochain. Il avait foi aux valeurs de la République et aux exigences de l’altérité. Son ancrage dans la tradition ne l’a jamais éloigné ni de Dieu, ni de la loi », a-t-témoigné.
Une relation privilégiée avec son président
Jean Nkuete, secrétaire général du Comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Cc/Rdpc), prenant la parole au nom de ce parti où le disparu siégeait au bureau politique, a salué le dévouement du chef de la délégation permanente régionale du Cc/Rdpc pour l’Ouest. « Ibrahim Mbombo Njoya est tombé au front. Les armes à la main. Il s’en est allé comme un vaillant chevalier en service au Rdpc. Il aura été l’un des symboles les plus remarquables de la dynamique de progrès. Le Rdpc qu’il l’a vu naître à Bamenda en 1985 en tant que délégué lors du congrès fondateur au cours duquel il a activement œuvré pour le choix du nom du parti. Le Rdpc qu’il n’a jamais cessé de soutenir et d’accompagner dans sa maturation continue, par sa grande stature, sa forte personnalité et la vigueur de ses idées. Avec la disparition de Ibrahim Mbombo Njoya, le Rdpc perd incontestablement un militant d’exception. Un dinosaure bien de nous quitter », signale-t-il.
Par la même occasion, le porte-parole de sa formation politique, a magnifié la relation privilégiée entre le sultan et le président national et président de la République du Cameroun. « Nous voulons témoigner qu’il s’est consolidé une relation singulière entre le président Paul Biya et le sultan Ibrahim Mbombo Njoya, caractérisée par la loyauté et la fidélité sans faille du sultan envers le président et la confiance totale du président envers le sultan. Cet homme de foie, pétri de conviction. Cet homme de culture passionnée pour l’homme. Cet homme d’esprit moulé dans la spiritualité. Patriote hors pair. Ce baron parmi les barons, avait la liberté de penser et le courage de dire et son propos parfois incisif ne laissait jamais indifférent et invitait au refus de l’immobiliste. C’était un grand patriote qui voulait un grand amour pour son pays et attachait le plus grand prix à son unité, à sa stabilité, à sa paix et à son développement. Si la culture était sa passion et la paix son obsession, Ibrahim Mbombo Njoya, n’envisageait jamais l’un sans l’autre. Convaincu comme il aimait à le répéter, que le meilleur chemin d’accéder à la paix, était la culture en tant lieu privilégié de confrontation des différences, de formations à la tolérance et au respect mutuel », a-t-il déclaré. Les volontés inachevées du Roi.
Le défunt Sultan laisse derrière lui des programmes ambitieux
Se tenant aux propos du Dr Inoussa Ngoupayou, 1er adjoint sultan roi des Bamoun, Ibrahim Mbombo Njoya est décédé au moment où il avait engagé de nombreux projets pouvant contribuer à l’amélioration des conditions de vie de ses sujets. Bien ayant « contribué ardemment à l’amélioration des cadres et conditions de vie des populations à la base. Il nous quitte sans vivre l’aboutissement de certains projets et programmes contenus dans sa vision de développement social et économique », précise-t-il. Selon les dires de ce proche collaborateur du défunt, Ibrahim Mbombo Njoya est retourné à ses ancêtres au moment où il s’apprêtait à inaugurer le mythique musée du roi Bamoun. Il attendait également la réponse du gouvernement à des principales suggestions faites par lui sur une nouvelle forme administrative du département du Noun. Il ne vivra pas l’aboutissement du processus d’inscription du Ngoun au patrimoine immatériel et universel de l’Unesco. Ce monarque n’aura pas également la joie d’être présent au lancement du chantier de construction de l’hôpital de référence à Foumbot, prévu le 27 octobre prochain, jour de son 84ème anniversaire. Le vaste programme agropastoral pour l’insertion des jeunes et l’autonomisation socioéconomique des femmes dans tout le Noun ne sera place sur sa supervision. « Le lancement au cours du mois de novembre prochain, de la mise sur le marché du médicament venin serin issue de la pharmacopée traditionnelle du roi Njoya, un médicament contre les venins de serpents, scorpions et autres insectes venimeux, la construction dès l’année prochaine d’un laboratoire d’analyses sur les plantes médicinales à Matum et d’une usine pharmaceutique à Foumban », a-t-il précisé. Cependant, « nous lui rassurons notre perpétuel engagement à poursuivre avec succès ces différents projets. En outre, nous gardons de lui, le devoir de préserver la paix et de promouvoir tous les idéaux qui concourent au rassemblement de notre peuple et aux affermissements de notre Noun Nation », s’engage Dr Inoussa Ngoupayou, 1er adjoint sultan roi des Bamoun dans son témoignage à l’illustre disparu.