Un amendement au Code pénal, qui rend les auteurs de cette pratique fortement ancrée dans les mentalités passibles de trois ans d’emprisonnement et d’amendes, a été approuvé fin avril dernier. Il se trouve désormais en attente d’une promulgation.
Le nouveau gouvernement postrévolutionnaire franchit un important cap dans la lutte contre les mutilations génitales féminines qui meurtrissent 9 fillettes sur 10. Un véritable retour d’ascenseur à la gent féminine. Ces femmes, qui ont obtenu la pénalisation de l’excision, sont également à l’origine de la révolution qui a débarrassé leur pays du dictateur Omar el-Béchir en avril 2019. En 30 ans de pouvoir, soutenu par les islamistes, Omar el-Béchir a muselé les femmes écartant notamment un projet de loi contre l’excision en 2015.
Les nouvelles autorités viennent de criminaliser cette mutilation génitale considérée comme une torture par l’ONU. Reste encore à faire appliquer la loi, car il ne suffit pas d’interdire pour mettre un coup d’arrêt à cette pratique culturellement très ancrée. Un an après la chute du régime islamiste d’Omar el-Béchir, c’est bientôt le bout du tunnel dans la lutte de longue haleine pour les femmes au Soudan : un article de loi, qui prévoit une peine allant jusqu’à trois ans de prison, va être ajouté dans le Code pénal national.
Une bataille de plus de trente ans !
Les femmes non excisées sont jugées impures et sont souvent mises à l’écart. Il était donc primordial qu’un changement de mentalité ait lieu pas à pas et que chaque petite fille soit jugée parfaite dès la naissance. Les femmes non excisées sont jugées « qulfa », un terme qui recouvre les notions de déshonneur et d’exclusion sociale. La prévalence des mutilations génitales féminines au Soudan est l’une des plus élevées au monde. « L’Afrique ne peut prospérer que si elle prend soin des filles et des femmes », lançait Faiza Mohamed, directrice régionale d’Equality Now, l’une des associations de défense des droits des femmes sur le ligne de front pour l’abolition de l’excision. Selon les défenseurs des droits des femmes, au cours des trois dernières décennies, l’excision a même regagné des contrées où elle avait cessé d’être pratiquée, comme les montagnes de Nubie, au nord du Soudan. Si les milieux les plus conservateurs estiment qu’elle préserve la chasteté, nombre de chefs religieux se sont prononcés contre. « Pénaliser l’excision n’est pas contraire à la religion. Il n’y a pas de textes qui permettent la circoncision des femmes », tranchait Sherine Abu Bakr, une autre militante. Les femmes soudanaises ont reçu, dans leur combat, le soutien de l’UNICEF.
L’appui de l’UNICEF
L’agence onusienne a introduit le mot « saleema »; ce terme arabe qui signifie parfait, intact, en bonne santé, indemne est devenu un synonyme très répandu pour désigner les femmes non excisées, car chaque petite fille vient au monde en étant parfaite et intacte. La campagne « Saleema » entraîne un changement de mentalité dans la société soudanaise; des dizaines de villages ont déclaré aujourd’hui publiquement qu’ils abandonnaient la pratique de l’excision. La norme sociale selon laquelle seules les filles excisées sont belles et aptes au mariage se transforme lentement en une nouvelle norme sociale qui juge les filles intactes et parfaites dès la naissance. Les mesures concrètes de l’UNICEF consistent en des programmes de sensibilisation à la radio et à la télévision ; des prises de position publiques de la part des représentants des gouvernements ; des déclarations de la part de chanteurs, écrivains et acteurs connus ; des prises de position de chefs spirituels et religieux.