L’interdiction de l’alcool avait été introduite dans le pays en 1983 par l’ancien président Gaafar Nimeiri. Arrivé au pouvoir en 1989 par un coup d’Etat soutenu par les islamistes, Omar el-Béchir a encouragé une stricte pratique de l’islam dans le pays. Ces interdiction et pratique sont tombées à la faveur d’une série d’amendements approuvés le 10 juillet à Khartoum.
Le Soudan a décidé d’autoriser la consommation d’alcool aux non-musulmans, interdite depuis 1983 dans le pays où la législation demeure très conservatrice plus d’un an après la chute de l’ex-président Omar el-Béchir. Le 11 juillet au soir, le ministre de la Justice Nasreddine Abdelbari a annoncé la suppression de l’article 126 du code pénal traitant de l’apostasie, qui rendait notamment la consommation d’alcool passible de la peine de mort. « Un amendement autorise les non-musulmans à consommer de l’alcool hors de l’espace public, tant qu’ils ne causent pas de dérangement », a-t-il déclaré, lors d’un entretien avec la chaîne de télévision publique. Les non-musulmans représentent environ 3% de la population soudanaise, selon les chiffres officiels. La décision d’autoriser la consommation d’alcool aux non-musulmans fait partie d’une série d’amendements progressistes approuvés le 10 juillet par le Conseil souverain, la plus haute instance du pouvoir au Soudan, censée assurer la transition vers un pouvoir civil.
Une interdiction vieille de 37 ans
« Quiconque confectionne, boit ou vend des boissons alcoolisées à Khartoum nous allons le fouetter, peu importe ce qu’en pensent les Nations unies ou les organisations de défense de droits de l’Homme », déclarait en mars 2010, le raïs soudanais Omar el-Béchir, lors d’un discours à Khartoum. Le président soudanais d’alors veillait au respect strict de la loi islamique en vigueur. Le code pénal soudanais influencé par la loi islamique, charia, interdisait la fabrication, la consommation ou la vente d’alcool, crimes passibles de 40 coups de fouet. Mais des dispositions de l’accord de paix signé entre le Nord, musulman, et le Sud, en grande partie chrétien, ont levé l’application de la loi islamique au Sud-Soudan et affirmé que les chrétiens à Khartoum pouvaient demander un arbitrage religieux particulier.
L’excision est désormais un crime
Parmi les amendements approuvés le 10 juillet, l’interdiction de l’excision, une pratique ancestrale très répandue dans le pays, a également été adoptée. Le Conseil souverain, formé de civils dont des femmes et de militaires, a approuvé une série de lois dont celle criminalisant une pratique « qui porte atteinte à la dignité de la femme », selon le communiqué. Fin avril, le gouvernement avait voté un amendement au code pénal qui rend les auteurs de l’excision passibles de peines allant jusqu’à trois ans d’emprisonnement avec paiement d’une amende. « La mutilation des organes génitaux de la femme est désormais considérée comme un crime » et « toute personne qui y a recours sera condamnée à une peine allant jusqu’à trois ans de prison », selon le texte de loi amendé. La clinique ou l’endroit où a eu lieu l’excision risquent également d’être fermés.
Sur Twitter, le Premier ministre soudanais, Abdallah Hamdok, a salué « un important pas sur la voie de la réforme judiciaire, et de la réalisation du slogan de la révolution : liberté, paix et justice ». Les autorités vont « réviser les lois et procéder à des amendements pour pallier les failles dans le système judiciaire », a-t-il conclu.