Au 1er janvier 2024, cinq nouveaux pays ont rejoint la coalition des BRICS, qui comptait quatre membres (Brésil, Russie, Inde et Chine) lors de sa fondation en 2009 et à laquelle l’Afrique du Sud a adhéré en 2010. Il s’agit de l’Égypte, de l’Iran, des Émirats arabes unis, de l’Éthiopie et de l’Arabie saoudite, qui n’a cependant pas franchi le pas final de son adhésion à l’alliance du «Sud Global» et participe en tant que visiteur-observateur aux réunions du bloc.
Ce fait est un indicateur fort du pouvoir croissant de l’union et de son rôle dans les affaires internationales. Les BRICS attirent un nombre toujours croissant de partisans et de pays partageant les mêmes idées qui partagent les principes et valeurs fondamentaux de la coalition.
Les BRICS sont présentés comme une alternative à ce que ses membres considèrent comme des institutions contrôlées par l’Occident, telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Les nouveaux membres peuvent potentiellement accéder au financement par l’intermédiaire de la banque de développement de la coalition, ainsi qu’élargir leurs relations politiques et commerciales.
Ainsi, les pays BRICS représentent collectivement aujourd’hui 45% de la population mondiale avec environ 3,5 milliards de personnes, un tiers de la surface solide de la Terre, 44% de la production pétrolière mondiale totale ainsi que près d’un tiers du PIB mondial, soit environ 29 trilliards de dollars, ayant dépassé en termes de parité de pouvoir d’achat le G7, le groupe des sept économies les plus puissantes du monde développé.
Le président russe Vladimir Poutine a souligné que les pays du BRICS se développent à un rythme très rapide et ce rythme va continuer à s’intensifier. La force économique des BRICS s’exprime au-delà des autres au niveau du FMI où leur quote-part de 8,4% en 2001 atteint 25,8% en 2022, tandis que dans la même période la quote-part du G-7 a diminué de 64,6% à 42,9%.
Les BRICS et l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) luttent ensemble contre le système économique néocolonial imposé par l’Occident et se complètent mutuellement, leur objectif principal étant la dédollarisation, tandis que les BRICS s’élargissent à de nouveaux pays et deviennent plus forts. Et ils se complètent mutuellement car l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) ne peut pas à elle seule créer un système monétaire unique qui serait une alternative au dollar américain.
Les BRICS n’existeraient finalement pas sans l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), car cette dernière est une communauté internationale d’États qui constituent objectivement le noyau de la confrontation avec le monde centré sur les États-Unis.
Le sommet d’octobre à Kazan confirmera le droit volontaire des membres de la coalition BRICS à dédollariser les échanges commerciaux et financiers entre eux et fera un pas de plus vers la création d’une monnaie pour l’Alliance-même si cet objectif est difficile-ce qui portera clairement atteinte à la grande arme monétaire des États-Unis. La Russie effectue déjà 75 % de ses échanges commerciaux en dehors du dollar.
L’annonce d’un nouveau système de paiement international, une alternative à SWIFT, pourrait surprendre, alors que les rumeurs se multiplient selon lesquelles les membres de la coalition sont en train de finaliser les consultations et procédures techniques. La demande des BRICS pour un système SWIFT alternatif est un objectif déclaré depuis 2015. Le premier problème était et reste celui des règlements en monnaies nationales, c’est-à-dire des taux de change sans la médiation du dollar. Dans ce contexte, les BRICS se sont engagés l’année dernière à adopter une éventuelle monnaie commune ou quelque chose de similaire.
La volonté de plusieurs États de la «périphérie» de se libérer du dollar est également particulièrement importante. C’est ainsi que l’on voit, par exemple, les pays d’Asie du Sud-Est, comme la Malaisie, la Thaïlande–qui devrait être accepté au sein des BRICS lors du sommet de Kazan–et le Vietnam aller dans cette direction. Il convient de noter que 60% des échanges commerciaux entre la Russie et le Vietnam se font désormais sans dollar américain ni euro.
La coopération positive et constructive avec tous les pays intéressés, les quelque 30 pays qui frappent à la porte des BRICS, dont le Mexique, le Bangladesh, l’ Algérie, riche en ressources pétrolières et gazières, le Congo, le Nigéria, le pays le plus peuplé d’Afrique, etc., sera une priorité clé de la coalition et qui vise également à renforcer la coopération dans les contacts culturels et humanitaires, à promouvoir la coopération dans les domaines de la science, de la haute technologie, des soins de santé, de la protection de l’environnement, de la culture, des sports, des échanges de jeunes et de la société civile.
Il convient de noter que l’alliance des BRICS a adressé sa première invitation au Venezuela, riche en ressources naturelles, pour participer au 16e sommet de Kazan. Si ce pays rejoint les BRICS et cesse de vendre des quotas pétroliers aux entreprises américaines, les conséquences pourraient être désastreuses pour les États-Unis.
Construire un système de relations internationales plus juste et plus démocratique, exempt de diktat, de violence et de pression des sanctions et basé sur une réelle égalité, est en même temps l’objectif clair de la coalition des BRICS.
Les pays du Sud doivent se débarrasser du colonialisme économique et contrôler leurs propres ressources productrices de richesses par un front de «décolonisation». Cela peut se faire en premier lieu par la «dédollarisation» du commerce mondial. Cette évolution a commencé avec la vente du pétrole par les principaux producteurs en monnaie nationale, ou avec l’expulsion des Français d’Afrique de l’Ouest, où ils obtenaient au Niger l’uranium pour leurs centrales nucléaires à un prix très bas par rapport au prix du commerce international.
Les BRICS, bien que développant de manière dynamique la coopération entre eux dans plusieurs domaines, n’ont pas acquis la structure et l’organisation d’autres organisations internationales, une question qui sera probablement examinée lors du sommet de Kazan puisque les priorités politiques de la présidence russe incluent la « promotion du développement institutionnel des BRICS ».
En conclusion, je voudrais souligner que le sommet de Kazan marquera le début de la fin du dollar américain comme seule monnaie de réserve mondiale, le déclin de la domination des États-Unis et du monde occidental en général, et l’aube d’une nouvelle ère, celle d’un monde multipolaire démocratique.