La réforme ayant abouti au référendum avait été approuvée en mars 2020 par le Parlement russe, fixant la consultation en avril. Mais elle a été repoussée à cause de la pandémie de COVID-19. Afin d’éviter une trop forte affluence dans les bureaux de vote, le scrutin s’est déroulé sur une semaine, du 25 juin au 1er juillet 2020. Avec un taux de participation avoisinant les 65 %, les Russes ont approuvé à 77,92 % un bloc d’amendements constitutionnels permettant notamment au président Vladimir Poutine de prolonger potentiellement son mandat jusqu’en 2036, l’année de ses 84 ans. Alors que le dirigeant au pouvoir depuis vingt ans a remercié les Russes d’avoir validé les réformes, le scrutin a été vivement critiqué par l’Occident et qualifié de « mensonge » par l’opposition. Alors que la loi russe interdisait au président d’effectuer plus de deux mandats consécutifs, un amendement a été ajouté pour permettre à Vladimir Poutine de remettre à zéro le nombre de ses mandats présidentiels.
La loi promulguée le 5 avril donne aussi une immunité à vie garantie aux présidents russes, même une fois qu’ils ont quitté leurs fonctions. Ce qui fait croire à la presse internationale que le président a trouvé un moyen d’échapper à des poursuites et à préparer sa sortie. En effet, Vladimir Poutine n’a rien laissé au hasard pour sa retraite. Le texte contient également de nouvelles exigences pour les candidats à la présidentielle. Ils doivent désormais être âgés d’au moins 35 ans, résider de façon permanente en Russie depuis au moins vingt-cinq ans et n’avoir jamais eu une citoyenneté étrangère ou un permis de séjour permanent d’un autre Etat que la Russie. Se trouvent par ailleurs intégrés à la Constitution des principes conservateurs chers au président : foi en Dieu, mariage réservé aux hétérosexuels ou encore enseignement « patriotique ».
« Qu’il promulgue dans la foulée une loi octroyant au président la vie éternelle », a ironisé de son côté sur Twitter, Evgueni Roïzman, détracteur du Kremlin et ancien maire de Iekaterinbourg. L’équipe de l’opposant emprisonné Alexeï Navalny a, elle, réagi en publiant une vidéo datant des années 2000 et dans laquelle Vladimir Poutine disait qu’il était opposé à ce qu’un président puisse effectuer plus de deux mandats. « Selon certains analystes, cette loi ne signifie pas forcément que Poutine cherche à rester président », note de son côté le correspondant du Guardian en Russie, Andrew Roth. Il est possible qu’« il cherche simplement à éviter de devenir un canard boiteux et de provoquer une lutte pour le pouvoir au cours de son dernier mandat ».
Certains articles de la loi promulguée par Vladimir Poutine sanctionnent les insultes envers les vétérans de la seconde guerre mondiale, désormais passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison. Alexeï Navalny avait justement été condamné en février à une amende pour diffamation envers un vétéran, qu’il avait qualifié de « traître » pour être apparu dans une vidéo promotionnelle en faveur du référendum constitutionnel. Ce n’est pas la première fois que Vladimir Poutine trouve une échappatoire à la limite de deux mandats. En 2008, il avait pris le poste de Premier ministre et laissé le Kremlin à son dernier chef de gouvernement Dmitri Medvedev. Après cet intermède de quatre ans, il avait été réélu président en 2012.