La plateforme de vidéos a récemment « renforcé ses règlements » sur les discours haineux, se justifie Google. Des suprémacistes blancs en ont également fait les frais.
La chaîne Youtube du polémiste Dieudonné M’Bala M’Bala, habitué des tribunaux et condamné à plusieurs reprises pour ses déclarations antisémites, a été supprimée par le géant du streaming, a-t-on appris ce mardi 30 juin auprès de Google France. La page du polémiste, qui existait depuis cinq ans et comptait plus de 550 vidéos et près de 450 000 abonnés, a disparu ces dernières heures. Cette suppression « rentre dans le cadre des processus de modération classiques de Youtube » et « fait suite à des enfreintes répétées à notre règlement de la communauté YouTube », a expliqué à l’AFP, Google France.
La maison-mère de la plateforme de vidéos en ligne rappelle également que Youtube « a renforcé ses règlements sur le “hate speech” [discours haineux, NDLR] en juin de l’année dernière », et vient de supprimer plusieurs chaînes de suprémacistes blancs aux Etats-Unis.
« Si votre contenu enfreint ce règlement, nous le supprimerons et vous enverrons un e-mail pour vous informer de cette décision. Si c’est la première fois que vous ne respectez pas le règlement de la communauté, vous recevrez une mise en garde sans sanction pour votre chaîne. Sinon, nous enverrons un avertissement à l’encontre de votre chaîne. Si vous recevez trois avertissements, votre chaîne sera clôturée. » mentionne les nouvelles règles de Youtube sur les propos haineux.
Selon le site Numerama, l’audience de la chaîne de Dieudonné était en très forte hausse ces derniers mois, passant de 2,5 millions de vues cumulées à 7,5 millions en mai. La disparition de la chaîne de Dieudonné « est une excellent nouvelle », a réagi auprès de l’AFP Frédéric Potier, le délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah). « Cette fermeture fait suite aux très nombreux signalements effectuées par la Dilcrah, tant au procureur de la République qu’aux plateformes elles-mêmes. ». La décision a également été saluée par l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), qui a signalé « des dizaines de vidéos » du polémiste à Youtube ces derniers mois.
« Cette fermeture fait suite à l’action de l’UEJF et de ses partenaires antiracistes qui combattent depuis des années, au jour le jour, la propagation des idées racistes, antisémites et négationnistes du pseudo humoriste », s’est réjoui l’organisation sur Facebook.
Condamné en novembre 2019
« Les centaines de milliers d’abonnés de Dieudonné se retrouvent orphelins de leur prêcheur de haine, et c’est tant mieux », a déclaré dans un communiqué la présidente de l’UEJF, Noémie Madar, en saluant une décision qui « marque une avancée majeure dans la lutte contre la haine sur internet ».
Pour elle, « les autres acteurs d’internet n’ont maintenant plus aucune excuse, à Twitter et Facebook de prendre également leurs responsabilités. » Des réseaux sur lesquels Dieudonné compte respectivement 150 000 et 1,2 million d’abonnés.
Le polémiste a réagi sur Facebook en dénonçant des « pressions israéliennes ». La suppression de sa chaîne rappelle selon lui « les autodafés des heures les plus sombres de l’Histoire ».
Protéger les jeunes et contrer les propos haineux
Or c’est principalement sur les réseaux sociaux, où les informations sont largement partagées sans être vérifiées, que les fake news et le discours haineux sont communiqués. Plus encore, selon une étude de 2016 de l’Université de Stanford, réalisée sur 7804 adolescents américains, 82% d’entre eux ne savent pas faire la différence entre un texte publicitaire marqué comme «contenu sponsorisé», et un article d’enquête provenant du même site. Une étude de l’organisme Common Sense Media réalisée sur 900 enfants âgés de 10 à 18 ans nous dit que 31% ont relayé une fake news durant les six derniers mois. Plus dérangeant encore, selon cette étude, 39% des enquêtés préfèrent s’informer uniquement sur Facebook, Twitter ou YouTube. Il s’agit donc d’une cible fragile. À l’observation, sans données chiffrées, ces indicateurs alarmants sont d’autant plus vrais et plus accentués dans le contexte camerounais où la pénétration des médias sociaux au sein des ménages est spectaculaire notamment en zone urbaine.
Ainsi, vue l’importance de l’information pour la stabilité politique des institutions et plus globalement pour la démocratie et la liberté d’expression, considérant l’influence des médias sociaux et d’internet de manière générale dans la vie académique et professionnelle des jeunes, tenant compte des dangers que présentent internet; il est devenu vital de maîtriser la collecte, le traitement et la diffusion de l’information via les médias sociaux auprès des enfants et des adolescents. Une campagne de sensibilisation périodique est un début. Des programmes de formation inclusifs seraient plus adapter.
Youtube amplifie sa stratégie de bannissement
Dans un contexte de protestation contre les violences racistes et policières depuis la mort de George Floyd le 25 mai dernier à Minneapolis, aux États-Unis, nombreuses sont les entreprises à être poussées à repenser leurs actions. Cela est notamment le cas de la plateforme YouTube qui a décidé de supprimer plusieurs milliers de chaînes suprémacistes pour violation de règles sur les discours haineux et incitant à la violence.
« Après avoir mis à jour nos règlements pour mieux résoudre la question des contenus suprémacistes, nous avons assisté à une multiplication par 5 du nombre de vidéos retirées et nous avons mis fin à plus de 25 000 chaînes pour violation de nos règles sur les discours de haine », a rapporté un porte-parole du géant YouTube. Ces multiples chaînes ont effectivement “enfreint de façon répétée” les règles de la plateforme, notamment en énonçant que certaines communautés étaient inférieures à d’autres.
Dans un contexte de protestations antiracistes, nombreux sont les réseaux sociaux à se voir de plus en plus reprocher une trop grande tolérance face aux contenus incitant à la haine et à la violence envers des minorités. YouTube a toutefois rappelé avoir déjà entamé cette lutte contre les contenus suprémacistes il y a maintenant un an. Elle avait alors interdit les propos haineux sur sa plateforme.