La République démocratique du Congo vit depuis quelques jours au rythme d’une affaire de détournement présumée d’argent public visant un proche du Chef de l’Etat Félix Tshisekedi, qui pourtant s’est engagé à lutter contre la corruption.
Certains ONGs s’interrogent sur le rôle du très influent directeur de cabinet du chef de l’Etat, Vital Kamerhe, dans cette affaire dite des 15 millions de dollars, le montant de la somme qui manquerait dans les caisses du Trésor public.
Le mouvement citoyen Lutte pour le changement a annoncé “une marche pacifique vendredi pour demander des comptes à la présidence congolaise. Appel maintenu malgré son interdiction par les autorités. Le fond de l’affaire est assez technique : le Trésor public a versé 100 millions de dollars à des sociétés pétrolières pour compenser leur manque à gagner. L’Etat devait récupérer une décote de 15 % de cette somme.
En effet, cette somme n’a pas bénéficié à l’Etat, observe l’Inspection générale des finances dans un rapport daté du 17 juillet. La décote de 15 millions a été versée sur le compte d’un comité de suivi des prix des produits pétroliers, une irrégularité qui viole les dispositions légales et règlementaires régissant les finances publiques, selon ledit rapport. Dans ses conclusions, le rapport attribue la responsabilité de cette irrégularité à plusieurs officiels, dont le directeur de cabinet du chef de l’Etat, Vital Kamerhe.
Le 31 juillet, l’inspecteur général-chef de service Victor Batubenga, a transmis ce rapport au procureur général près la cour de Cassation. “Face à des obstructions répétées”, M. Batubenga demandait au parquet d’apporter son assitance pour enquêter dans cette affaire.
Quel est le problème ?
Le détournement présumé d’une somme de 15 millions de dollars américains. De l’argent public qui, selon l’Inspection générale des Finances, aurait dû être placé dans les caisses de l’État à la Banque centrale, mais a été viré en mai dernier à la demande du ministre de l’Économie par intérim Henry Yav Mulang sur un compte ouvert dans une banque privée, la Rawbank, au nom du Comité de suivi des prix des produits pétroliers, que préside le ministre, et d’où cet argent a depuis été presque intégralement retiré en liquide. Pour quel motif ? Où est passé cet argent ? C’est la question que se pose l’IGF mais aussi la justice, qui a ouvert une enquête préliminaire sur le sujet.
à quoi correspondent ces 15 millions ?
Ces 15 millions de dollars correspondent à 15 % de retenue effectuée par l’État congolais sur une somme de 100 millions de dollars empruntés par la RDC et destinés à l’origine à plusieurs compagnies de distribution de pétrole, en compensation notamment du gel des prix à la pompe en 2017, décidé par l’État congolais face à la flambée des prix du pétrole. Selon l’IGF, c’est le ministre de l’Économie par intérim qui en fait la demande à la Banque centrale par courrier en date du 16 mai. Si du côté de la présidence on affirme que le principe de cette retenue qualifiée de « décote » est une pratique « courante », plusieurs sources affirment aussi que cet argent aurait dû être placé sur les comptes du Trésor public à la Banque centrale et non dans une banque privée. Une source proche de l’enquête indique également que cette « décote » de 15 millions aurait dû faire l’objet d’une « entente avec les pétroliers » et d’une réunion de l’ensemble du Comité de suivi des prix pétroliers, mais que cela n’a pas été le cas. La justification de cette décote et les circonstances dans lesquelles elle a été décidée restent « floues », affirme cet interlocuteur.