A la veille du lancement officiel de leur campagne, un sondage de l’institut Ipec donnait un avantage confortable à Lula da Silva, 76 ans, avec 44 % des intentions de vote au premier tour, contre 32 % pour le chef de l’Etat actuel, Jair Bolsonaro, 67 ans. Fin juillet, une enquête d’opinion de l’autre institut de référence, Datafolha, faisait état d’un écart plus important : 47 % pour Lula, 29 % pour Bolsonaro. Le président sortant brandit la menace de ne pas respecter le résultat, créant un climat des plus tendus.
Le chef de l’Etat compte refaire son retard grâce aux aides sociales approuvées récemment par le Parlement lors d’un amendement à la Constitution controversé qui autorise exceptionnellement de nouvelles dépenses durant la période électorale. Lula tente aussi de rajeunir son image pour regagner du terrain sur les réseaux sociaux, où il est largement distancé par Bolsonaro en termes d’abonnés. Soutenu par de nombreux artistes, l’ancien métallo n’hésite pas à publier des vidéos humoristiques sur les réseaux sociaux.
C’est dans ce climat très tendu que les deux hommes ont officiellement lancé leur campagne électorale. Ils ont tous deux choisi des lieux hautement symboliques. A la mi-journée, Jair Bolsonaro était dans l’Etat du Minas Gerais, à Juiz de Fora, « la ville où je suis né à nouveau », a-t-il dit en introduction de son discours. L’ancien capitaine de l’armée a poussé la symbolique jusque dans le moindre détail en se hissant sur une estrade installée sur le même carrefour où il avait été poignardé par un déséquilibré.
Vêtu d’une veste noire boutonnée jusqu’au cou dissimulant les formes d’un gilet pare-balles, Jair Bolsonaro a égrené un discours chargé de déclarations patriotiques et d’allusions à Dieu et à la Bible. Il a réitéré sa promesse de lutter contre l’inflation à deux chiffres, l’avortement, la drogue, et de défendre la « propriété privée », brandissant la menace « communiste » au Brésil s’il perd les élections contre son rival Lula.
Malgré son âge, Lula da Silva dit sentir la même « énergie qu’à 30 ans », et entend « reprendre le pays » à Jair Bolsonaro qu’il qualifie de « génocidaire » et « négationniste » pour sa gestion de la pandémie de COVID-19 qui a fait 680 000 morts au Brésil. L’ancien président (2003-2010) a tenu son premier meeting dans une usine automobile de son fief de Sao Bernardo do Campo, près de Sao Paulo, zone industrielle où il a été tourneur-fraiseur, avant de devenir leader syndical dans les années 70.
« C’est ici que tout a commencé : ici que j’ai acquis une conscience politique. En ce jour important de ma vie, au début de la campagne électorale, je suis venu ici pour vous dire que nous allons gagner les élections », a lancé le favori des sondages, vêtu d’une chemise blanche et juché sur un plateau, entouré de centaines d’ouvriers métallurgistes. Le 16 août était également jour d’intronisation du juge Alexandre de Moraes à la présidence du Tribunal supérieur électoral (TSE). Ce magistrat de la Cour suprême est une des bêtes noires du président Bolsonaro, contre lequel il a ordonné l’ouverture d’une enquête pour diffusion de fausses informations sur le système électoral.