Lors d’un discours prononcé devant les forces de sécurité à Gitega, le 20 décembre, le président du Burundi a annoncé son intention de se retirer du pouvoir au terme de son mandat en 2020.
« Cette fête est ma dernière, l’année prochaine à la même période ce n’est pas moi qui prendrai la parole, vous serez en train de faire une cérémonie pour un nouveau chef d’État », a déclaré le président Pierre Nkurunziza le 20 décembre à Gitega, la nouvelle capitale, aux membres des corps de défense, de sécurité et du renseignement. Le président a saisi l’opportunité de cette cérémonie de vœux, pour faire ses adieux. « Je vais vous demander une chose : multipliez par trois auprès de mon successeur la fidélité et l’engagement que vous m’avez manifesté au cours de ces 15 dernières années », a formulé le président. Au pouvoir depuis 2005, Pierre Nkurunziza déclare ainsi à cor et à cri qu’il ne briguera pas un quatrième mandat en mai 2020. Le président de 55 ans, leader du Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD), avait décidé en 2015 de briguer un troisième mandat à la présidence de la République, violant l’article 96 de la constitution du Burundi, promulguée en mars 2005. Sa candidature ne fut validée que par une décision controversée de la Cour constitutionnelle. Depuis lors le pays traverse une crise socio-économique et politique émaillée de violences, d’où les doutes émis par l’opposition après cette annonce.
Une opposition sceptique
Pour la présidentielle couplée aux élections locales, fixée au 20 mai 2020, la posture du président Pierre NKurunziza semble tenir d’une vieille promesse faite lors de la prestation de serment en 2015. « Nous jurons de respecter la décision de la Cour constitutionnelle en ce qui concerne ce dernier mandat que vous venez de nous accorder (…) Un homme se retourne dans son lit, mais ne se retourne pas dans sa parole », tranchait le président, qui reconnaît que « le fait de ne pas revenir sur sa parole fait partie des valeurs aussi bien des militants du parti CNDD-FDD que des Burundais ».
Considérant que la nouvelle Constitution, adoptée par référendum le 17 mai dernier, offre la possibilité de briguer deux nouveaux mandats de sept ans chacun au président Nkurunziza, l’opposition balaie son annonce d’un revers et préfère se concentrer sur son réel combat. « Pour nous, ce qui est important, ce n’est pas tant sa candidature, qu’il revienne ou qu’il ne revienne pas, c’est l’organisation d’élections dans des conditions crédibles, qui permettent un scrutin réel. C’est ça le véritable enjeu », recentre François Nyamoya, le secrétaire général du Mouvement pour la solidarité et la démocratie (MSD).
Situation tendue
Selon Michel Kafando, qui a quitté son poste d’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour le Burundi en octobre dernier, la situation de ce pays demeure tendue. Devant le Conseil de sécurité, il a fait part d’« une montée de l’intolérance politique et des atteintes aux libertés civiques et politiques » dans le pays. Concernant le processus électoral dont la gestion est du ressort de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), « il faut espérer qu’il sera transparent », a dit M. Kafando, rappelant que « des élections mal organisées et contestées, on le sait, sont toujours sources de conflit ». Alors que la situation socio-économique du pays continue de se détériorer, la situation sécuritaire, « il faut bien l’admettre », s’est améliorée sur toute l’étendue du territoire, « même si, ici et là, des abus et autres violations des droits de l’homme continuent à être rapportés », a dit l’envoyé onusien. « En tout état de cause, il convient d’encourager le gouvernement dans les obligations qui sont les siennes de garantir la sécurité de tous ses citoyens et de mettre fin à l’impunité », a-t-il conclu.