Simon Mugenyi Byabakama, le président de la commission électorale, a appelé la population à « rester calme et accepter le résultat de ces élections ». Selon les résultats publiés le 16 janvier, Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 1986, a été réélu avec 58,64 % des voix, alors que son principal adversaire, Bobi Wine, a obtenu 34,83 % des voix. Bobi Wine, 38 ans, a contesté les résultats du scrutin, dénonçant « une mascarade complète » et estimant avoir « largement remporté » l’élection. Le député et ancien chanteur de ragga, populaire auprès de la jeunesse ougandaise, a décrit des fraudes massives telles que des bourrages d’urnes, des bulletins préremplis, des électeurs n’ayant reçu les bulletins que pour les législatives ou des agressions contre les observateurs de son parti, parfois chassés des bureaux de vote. Une fois l’accès à Internet rétabli, il a promis produire des vidéos pour prouver le « pire trucage jamais connu » en Ouganda.
Tibor Nagy, le secrétaire d’Etat adjoint aux affaires africaines américain, sur Twitter, a estimé le vote « fondamentalement biaisé », dénonçant « la violence et le harcèlement des responsables de l’opposition ». Il a estimé « essentiel le rétablissement immédiat et total des connexions à Internet » et « exhorté tous les acteurs à la retenue et au rejet de la violence ». Le 12 janvier, le président Museveni avait publiquement assumé la censure des réseaux sociaux. Il s’agissait selon lui d’une mesure de rétorsion à la suspension par Facebook de plusieurs comptes liés au gouvernement, accusés de se coordonner pour influer artificiellement sur le débat public. Dans son discours, après l’annonce des résultats, Yuweri Museveni n’a pas hésité à affirmer que « le scrutin était probablement le plus propre depuis 1962 », année de l’indépendance du pays, et a promis « d’améliorer l’accès à l’éducation et d’augmenter le niveau de vie ».
Ancien guérillero, Museveni a pris le pouvoir en 1986, mettant fin aux bains de sang et au chaos des années Idi Amin Dada et Milton Obote. Se plaignant des dirigeants qui ne savent pas partir, le jeune président, d’abord applaudi comme un dirigeant moderne s’est progressivement mué en président autoritaire. Près de 35 ans plus tard, âgé de 76 ans, c’est lui qui s’accroche au pouvoir coûte que coûte. Son parti, le Mouvement de résistance nationale, a modifié deux fois la Constitution pour lui permettre de rester au pouvoir. Avec une participation de 57,22 %, les élections se sont déroulées à l’issue d’une campagne particulièrement violente, marquée par le harcèlement et les arrestations de membres de l’opposition, des agressions contre les médias et la mort d’au moins 54 personnes dans des émeutes à la suite d’une énième arrestation de Bobi Wine, dont la campagne a été largement entravée.
La police a conseillé aux Ougandais de ne pas sortir pour célébrer ou contester les résultats, invoquant les mesures de lutte contre le COVID-19, les mêmes utilisées durant la campagne pour empêcher les rassemblements de l’opposition. Le parti de Bobi Wine, la Plate-forme de l’unité nationale (NUP), n’a pas exclu la possibilité de manifestations. « Les gens sont en colère parce que leur vote a été volé. Ils n’ont pas besoin de moi ou de Bobi Wine pour leur dire de se mettre en colère, Même nous, nous ne pouvons pas les contrôler », a déclaré Joel Ssenyonyi, le porte-parole du NUP.