Cette démission de Rheinhard Marx intervient alors que le pape François a ordonné fin mai une enquête sur le traitement de cas d’agressions sexuelles de mineurs au diocèse de Cologne, le plus grand d’Allemagne, secoué par une grave crise depuis des mois. Le pape a ainsi nommé deux « visiteurs apostoliques », des envoyés pontificaux extraordinaires, chargés d’« appréhender la situation pastorale complexe à l’archevêché et parallèlement d’étudier d’éventuelles fautes » du cardinal Rainer-Maria Woelki et d’autres prélats du diocèse. Le cardinal Woelki, un conservateur dans les rangs de l’Eglise, est accusé notamment d’avoir longtemps couvert deux prêtres de la communauté religieuse de Düsseldorf soupçonnés de violences sexuelles.
Reinhard Marx, l’archevêque de Munich et ancien président de la conférence épiscopale allemande, a demandé au pape François d’être déchargé de ses fonctions, reconnaissant un « échec » de l’Eglise catholique dans la « catastrophe des abus sexuels » au sein de l’institution. « Pour moi, il s’agit essentiellement de partager la responsabilité de la catastrophe des abus sexuels commis par des responsables de l’Eglise au cours des dernières décennies », a-t-il écrit à l’évêque de Rome, selon un communiqué publié le 4 juin, dans lequel il dénonce également un « échec institutionnel ou systémique » dans ce vaste scandale qui éclabousse aussi l’Eglise catholique allemande.
Dans ce courrier adressé au pape le 21 mai et largement cité dans le communiqué, le prélat juge que l’Eglise catholique est arrivée à un « point mort ». Les récentes discussions ont montré que « certains au sein de l’Eglise ne veulent pas accepter cette responsabilité et donc la complicité de l’institution et s’opposent donc à tout dialogue de réforme et de renouvellement en lien avec la crise des abus » sexuels, poursuit-il dans cette lettre au vitriol. Si jusqu’à présent le souverain pontife n’a pas encore accepté cette démission, certains observateurs, se basant sur le temps écoulé depuis l’émission de la lettre du cardinal, que son destinataire l’a poussé à la démission.
En Allemagne, cette annonce a eu l’effet d’un tremblement de terre ou nouvel épisode pour une Eglise catholique traversée par des turbulences depuis plusieurs années. En effet, la démission de Reinhard Marx dont l’audience dépasse largement les frontières de la Bavière, secoue les catholiques allemands, mais pas seulement. Dans un geste qui est aussi bien un aveu d’échec qu’un coup de semonce, l’archevêque de Munich joue son va-tout dans une guerre de tranchées autour de réformes qu’il juge indispensables et dont l’épiscopat, allemand, mais aussi bien au-delà, ne partage pas unanimement l’urgence. « Nous sommes dans une impasse qui, néanmoins, pourrait aussi devenir un tournant, me dit mon espérance de Pâques », a-t-il écrit dans sa lettre de démission.