Confronté à la colère de la rue, le Premier ministre libanais, Saad Hariri, a annoncé lundi l’adoption par le gouvernement d’une série de réformes économiques. Il a par ailleurs affirmé son soutien à la tenue d’élections anticipées.
Après cinq jours de contestation populaire inédite au Liban, le Premier ministre Saad Hariri a présenté, lundi 21 octobre, une série de réformes économiques et le budget 2020 adoptés par le conseil des ministres. Il s’est également montré favorable à la tenue d’élections anticipées réclamées par les manifestants. « Votre voix est entendue, et si vous réclamez des élections anticipées (…), moi, Saad Hariri, je suis personnellement avec vous », a affirmé le chef du gouvernement lors d’une conférence de presse.
Les mesures prises par l’exécutif ont été annoncées à l’issue d’une réunion extraordinaire du gouvernement, alors que le mouvement de contestation déclenché jeudi réclame le départ de l’ensemble de la classe politique, jugée corrompue et incapable de trouver des solutions à la grave crise économique et sociale qui perdure.
Des salaires réduits pour la classe politique
En ce qui concerne les finances publiques, Saad Hariri se fixe une réduction du déficit de l’État, qui passerait à 0,63 % du produit intérieur brut (PIB) en 2020, contre 7,59 % dans le budget 2019. Les économies envisagées passeront notamment par la réduction de moitié des salaires des présidents, des ministres et des parlementaires, en exercice ou honoraires. Saad Hariri compte également baisser divers avantages accordés aux hauts fonctionnaires et supprimer, par mesure d’économie, certains ministères et organismes étatiques, tel que le ministère de l’Information.
Les banques privées mises à contribution
Les banques commerciales et la Banque centrale vont parallèlement contribuer à la réduction du déficit budgétaire à hauteur de 5 100 milliards de livres libanaises, soit 3,03 milliards d’euros, par le biais notamment d’une taxe sur les bénéfices. Ce montant comprend les recettes escomptées d’une hausse de l’impôt sur les profits des banques. Plusieurs institutions publiques et secteurs, dont celui de la téléphonie mobile, le Port de Beyrouth, le Casino du Liban et la Middle East Airlines (MEA), doivent par ailleurs faire l’objet d’une étude en vue d’une privatisation partielle ou totale. Du côté de l’établissement public Électricité du Liban (EDL), Saad Hariri prévoit une baisse du déficit de 1 000 milliards de livres, soit 600 millions d’euros.
Sur le plan social, le gouvernement veut adopter avant la fin 2019 un nouveau régime de retraite et de protection sociale et fournir une allocation de 20 milliards de livres supplémentaires (11,9 millions d’euros) au programme de soutien aux ménages les plus démunis. Pour lutter contre la pauvreté, les dirigeants libanais ont décidé d’accélérer l’obtention d’un prêt d’environ 100 millions de dollars de la Banque mondiale assorti d’un taux d’intérêt de 1 % pour soutenir les classes défavorisées. Les prêts logements devraient aussi être subventionnés à hauteur de 160 millions de dollars.
Le gouvernement s’engage par ailleurs à lutter contre la corruption, en créant une Autorité nationale dédiée, en installant des scanners pour traquer la contrebande ou encore en renforçant les sanctions imposées aux contrevenants. L’exécutif va également plancher sur un projet de loi pour récupérer l’argent public volé.
Le financement de nouveaux projets d’infrastructure va être entièrement revu. L’État compte notamment faire appel à des investissements directs étrangers. Le Liban souhaite développer ses infrastructures, comme les axes routiers aux entrées nord et sud de Beyrouth. Le gouvernement va aussi accélérer, d’ici quatre mois, la délivrance de licences pour construire de nouvelles centrales électriques, un moyen de répondre à la crise de ce secteur coûteux et défaillant qui pèse particulièrement sur les finances publiques. L’exécutif veut enfin lancer la première phase du plan d’investissement dans les infrastructures approuvé lors de la conférence d’aide internationale, à Paris, en avril 2018 et créer des Autorités de régulation des secteurs de l’énergie, des télécommunications, de l’aviation civile et de la Bourse de Beyrouth.