C’est finalement le 29 juillet 2022, à deux jours du scrutin, presque en catimini qu’Abdoulaye Wade est rentré au Sénégal, après plusieurs années passées dans sa résidence versaillaise en France. Pour les élections législatives du 31 juillet, plusieurs coalitions étaient en lice. « Yewwi Askan Wi », Libérer le Peuple en langue wolof, la principale coalition de l’opposition, formée autour d’Ousmane Sonko, arrivée troisième de la présidentielle de 2019, a fait alliance avec la coalition « Wallu Sénégal », Sauver le Sénégal en wolof, dirigée par l’ex-président Abdoulaye Wade. Règle de l’alliance : la moins bien placée dans un département s’engage à soutenir l’autre pour imposer une cohabitation gouvernementale. Face à cette alliance, la coalition au pouvoir Benno Bokk Yakaar.
Principal enjeu des législatives du 31 juillet 2022 : renouveler pour cinq ans les 165 sièges du parlement monocaméral largement contrôlé par le camp présidentiel. Le chef de l’Etat, Macky Sall, a promis de nommer un Premier ministre, poste qu’il avait supprimé puis rétabli en décembre 2021, au sein de la formation victorieuse des élections. Si ces élections ont valeur de test avant la présidentielle de 2024 pour laquelle le président Macky Sall ne s’est pas encore prononcé, elles servent de théâtre à la rancune tenace que l’ancien président Abdoulaye Wade voue à l’actuel président sénégalais.
Sinon, pourquoi diable Abdoulaye Wade, 96 ans, et après avoir dirigé le pays pendant douze ans, se présente-t-il aux législatives alors qu’il a tout à y perdre ? Vraisemblablement, le patron du Parti démocratique sénégalais (PDS) tient à prendre sa revanche sur son ancien poulain, Macky Sall, qui l’a détrôné en 2012 avant de faire emprisonner son fils Karim, condamné pour enrichissement illicite en 2015. « Wade est un combattant qui luttera jusqu’à son dernier souffle. Comme il le dit souvent lui-même, il n’affectionne rien de plus que le corps-à-corps avec ses adversaires », explique l’un de ses proches. Quelques jours après le vote pour le renouvellement des sièges au parlement, l’incertitude plane.
« Nous avons gagné 30 départements » sur les 46 que compte le Sénégal et des circonscriptions à l’étranger. « Ceci nous donne incontestablement une majorité à l’Assemblée nationale », a déclaré à la presse la tête de liste de la coalition présidentielle, Aminata Touré, sans donner le nombre de députés obtenus par son camp ni préciser s’il s’agit d’une majorité relative ou absolue. Elle a reconnu la défaite de sa coalition à Dakar. La réplique n’a pas tardé du côté de l’opposition. Barthélémy Dias, membre de la coalition dirigée par le principal opposant Ousmane Sonko, a parlé de « vulgaire mensonge » et de « majorité préfabriquée », sur la radio privée RFM. « La cohabitation est inévitable. Vous avez perdu cette élection au niveau national. Nous ne l’accepterons pas. Cette forfaiture ne passera pas », a précisé le maire de Dakar, sans donner de chiffre.