Depuis New York lors d’une récente visite, le président Alpha Condé a appelé ses compatriotes à se préparer à un référendum et à des élections, ce qui a éveillé les soupçons dormants de l’opposition sur son intention de briguer un troisième mandat.
Alpha Condé, dont le deuxième et dernier mandat s’achève en octobre 2020, a souvent contesté la pertinence de la limitation du nombre de mandats en Guinée. Début septembre, il a chargé son Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, de conduire des consultations sur une possible révision de la constitution, qui ont été boycottées par les principaux partis d’opposition. Son appel aux guinéens depuis New York, du 23 septembre, « à se préparer à un référendum et à des élections », a suffi à faire perdre le sommeil à l’opposition.
La question est désormais sur toutes les lèvres. Le président Alpha Condé a-t-il la tentation du troisième mandat ? Franchira-t-il le Rubicon ? L‘homme, aujourd’hui âgé de 81 ans, est la cible de virulentes attaques de l’opposition qui s’est réunie à Conakry le 7 octobre dernier pour harmoniser son plan de contestation contre toute révision de la constitution.
Des manifestations républicaines dès le 14 octobre 2019
C’est la principale résolution de la concertation du 7 octobre dernier. Abdouramane Sanoh, coordonnateur du Front national pour la défense de la constitution (FNDC), ne décolère pas. « Maintenant que Alpha Condé a exprimé publiquement le 23 septembre 2019, sa décision de faire un coup d’Etat constitutionnel, le FNDC appelle les guinéens à des manifestations tant sur le territoire national qu’à l’étranger pour exprimer son opposition totale au projet de 3e mandat », a-t-il martelé.
Sidya Touré, président de l’Union des forces républicaines (UFR), lui, veut aller de l’avant : « nous n’accepterons pas que le peuple de Guinée soit caporalisé. Nous sommes déterminés à aller de l’avant. Nous allons faire en sorte que les guinéens démontrent exactement où est la légitimité dans ce pays ».
Cellou Dalein Diallo, chef de l’opposition et président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), dénonce les futures législatives programmées selon lui, sans consensus pour la fin de l’année. « Il y a une mascarade électorale qui se prépare à travers les législatives pour octroyer à Alpha Condé la majorité nécessaire à l’adoption de la constitution par une assemblée illégitime et illégale. Nous nous battons pour nous-mêmes et pour les générations futures », a-t-il prévenu.
L’opposition suspend sa participation au parlement
Les députés d’opposition ont décidé vendredi 11 octobre de « suspendre leur participation aux travaux de l’Assemblée nationale » pour protester contre l’ambition du président Alpha Condé de faire réviser la constitution pour briguer un troisième mandat, à trois jours de manifestations considérées à haut risques par le gouvernement. L’opposition compte 53 députés sur les 114 que compte l’Assemblée.
Le gouvernement en phase avec Alpha Condé
Pendant des mois, le pouvoir a entretenu le flou mais, à l’issue du conseil des ministres du 27 juin 2019, le voile a été levé. « Le président de la République a pris acte de la volonté librement exprimée par la totalité des membres du gouvernement de s’inscrire résolument dans la dynamique du référendum pour une nouvelle constitution », a précisé le compte rendu du gouvernement. Ce qui redonne des forces à la rivalité, vieille de dix ans, entre le président guinéen et son principal opposant Cellou Dalein Diallo, qui s’accusent mutuellement de mettre en péril la stabilité du pays.