Le chef de la junte au pouvoir en Guinée a annoncé lundi 19 février par décret la dissolution du gouvernement en fonction depuis juillet 2022, selon une vidéo diffusée sur la page Facebook de la présidence.
« Le gouvernement est dissous » et « la gestion des affaires courantes sera assurée par les directeurs de cabinet, les secrétaires généraux et les secrétaires généraux adjoints jusqu’à la mise en place d’un nouveau gouvernement », a dit un porte-parole de la junte, le général Amara Camara. Il s’est exprimé devant une vingtaine de militaires en tenue, dont certains masqués et arborant des armes.
Le Comité National du Rassemblement pour le developpement (CNRD) a annoncé le gel des comptes bancaires et la saisie des passeports des ministres remerciés, également sommés de rendre leurs véhicules de fonction. Après plusieurs jours de cacophonie gouvernementale sur fond de crise sociale, la mise en scène souligne que la junte de Mamadi Doumbouya, réunie au sein du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) depuis le coup d’Etat contre le président Alpha Condé, tient fermement la barre. Les militaires tiennent sans doute à rappeler que le temps n’est toujours pas venu de contester leur autorité autoproclamée.
Il n’a donné aucune raison à la dissolution du gouvernement, ni donné de date pour en annoncer un nouveau.
Une crise sociale en perspective
La junte, avec à sa tête le colonel Mamady Doumbouya, qui a pris le pouvoir en septembre 2021, a consenti sous pression internationale à rendre la place à des civils élus d’ici à fin 2024, le temps de mener de profondes réformes, dit-elle. La junte a fait arrêter un certain nombre de dirigeants de l’opposition et lancé des poursuites contre d’autres. Elle interdit toute manifestation depuis 2022. Le pays connaît aussi depuis plusieurs semaines de sévères limitations d’accès à Internet. La junte a par ailleurs sévi contre un certain nombre de médias. L’opposition dénonce la conduite autoritaire et exclusive du pays.
La Guinée fait face à une pénurie d’hydrocarbures depuis la colossale explosion, mi-décembre à Conakry, du principal stock national de carburant. L’actuelle saison sèche supposerait pourtant un recours accru aux centrales thermiques pour produire de l’électricité, et donc un besoin ardent du pétrole parti en fumée. Sans compter l’inflation. Les prix du riz et de la farine augmentent. Comme celui des matières premières sur le marché mondial.
Face à ces difficultés, treize centrales syndicales agitent la menace d’une grève générale illimitée pour protester contre la dégradation des conditions de vie et pour la libération du secrétaire général du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG), Sékou Jamal Pendessa, placé sous mandat de dépôt depuis le 22 janvier. Les Guinéens ne se font guère d’illusion sur les chances du futur gouvernement de les extraire de la misère. Le dernier indice de développement humain (IDH) établi fin 2021 par les Nations unies place leur pays dans les tréfonds du classement mondial : 182e sur 191.