Dans son dernier livre de 528 pages, « Le Temps des tempêtes », paru le 24 juillet, aux éditions de L’Observatoire, Nicolas Sarkozy avoue « je dois bien reconnaître que j’aime les tempêtes, et pas simplement dans le sens climatique ». Avec l’affaire de financement libyen, le président de la République France, de 2007 à 2012, est dans servi. Après la mise en examen en mars 2018 pour « corruption passive », « recel de détournement de fonds publics » et « financement illégal de campagne », une nouvelle mise en examen pour « association de malfaiteurs » a été annoncée le 16 octobre par le Parquet national financier.
Dans la foulée de cette annonce, l’ancien président a réagi sur Twitter. « J’ai appris cette nouvelle mise en examen avec la plus grande stupéfaction. Voici donc franchie une nouvelle étape dans la longue liste des injustices commises tout au long de l’affaire dite du prétendu « financement libyen » de ma campagne électorale de 2007 », a-t-il écrit. Nicolas Sarkozy a été entendu ces dernières semaines pendant plusieurs jours par les juges chargés de l’enquête. « Après quatre journées d’interrogatoire, au cours desquelles j’ai répondu à toutes les questions qui m’ont été posées sans jamais être mis en difficulté mon innocence est à nouveau bafouée par une décision qui ne rapporte pas la moindre preuve d’un quelconque financement illicite », dénonce Nicolas Sarkozy. Les 44 heures d’interrogatoire n’ont pas suffi à lever les soupçons qui pèsent contre l’ancien président, ami de l’Afrique.
En 2018, dans une missive de huit pages à la justice, transmise par ses avocats britanniques, Saïf al-Islam Kadhafi le deuxième fils de Mouammar Kadhafi assure qu’il y a bien eu des échanges financiers illicites entre le dictateur et les proches de Sarkozy. Il explique que la Libye avait décidé d’apporter un soutien financier à Nicolas Sarkozy, qui dépassait de loin Dominique de Villepin dans les sondages. Un soutien de 2,5 millions d’euros que le candidat à la présidentielle aurait perçu, selon lui, en petites coupures. « M. Sarkozy a dépêché un représentant, Claude Guéant, afin de recevoir l’argent », affirme le fils de Mouammar Kadhafi. « La valise n’ayant pu contenir les sommes facilement, Claude Guéant est monté dessus, appuyant avec ses pieds pour la fermer. Claude Guéant est ensuite reparti en France avec ce montant », poursuit Saïf al-Islam Kadhafi dans sa lettre, s’appuyant sur les confidences de Bechir Saleh, ex-directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, qui aurait été chargé de transmettre l’argent. « Les Français doivent savoir que je suis innocent de ce dont on m’accuse en apportant un crédit invraisemblable aux déclarations d’assassins, d’escrocs notoires et de faux témoins », martèle Nicolas Sarkozy.
L’enquête avait été ouverte après la publication par Mediapart en 2012, dans l’entre-deux tours de la présidentielle, d’un document censé prouver que la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy avait été financée par le régime de Mouammar Kadhafi. Témoignages de dignitaires libyens, notes des services secrets de Tripoli, accusations d’un intermédiaire… En sept ans de travail, les magistrats ont réuni une somme d’indices troublants qui ont donné corps à la thèse selon laquelle la campagne de l’ex-président français avait été financée par le régime de Mouammar Kadhafi. Toutefois, aucune preuve matérielle indiscutable n’a pour l’heure été trouvée, même si des mouvements de fonds suspects ont conduit à neuf mises en examen à ce jour.
En novembre 2016, l’homme d’affaires Ziad Takieddine, un des mis en examen dans cette affaire et en fuite depuis sa condamnation en juin dans le volet financier de l’affaire Karachi, avait affirmé avoir remis entre fin 2006 et début 2007 cinq millions d’euros à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, et à son directeur de cabinet Claude Guéant. Outre ce dossier, dans lequel les investigations sont encore en cours, l’ex-chef de l’Etat doit être jugé du 23 novembre au 10 décembre pour « corruption » dans l’affaire dite des « écoutes » : il est soupçonné d’avoir tenté, avec son avocat Thierry Herzog, d’obtenir d’un haut magistrat, Gilbert Azibert, des informations couvertes par le secret dans une procédure judiciaire. Nicolas Sarkozy doit également être jugé du 17 mars au 15 avril 2021 pour le financement illégal de son autre campagne présidentielle, celle de 2012, dans le cadre de l’affaire Bygmalion : il lui est reproché le dépassement du plafond de dépenses de campagne. Décidément, la météo judiciaire ne sera pas clémente avec l’auteur de « Le temps des tempêtes ».