Après 3 ans, 3 mois et 24 jours à la tête du ministère des Affaires étrangères, il a quitté le gouvernement et le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix.
« En tant qu’homme public ayant assumé de nombreuses responsabilités au service de mon pays, je me dois de m’adresser à vous directement, pour vous informer de ma démission du gouvernement.
Je tiens à remercier le président de la République, S.E.M. Alassane Ouattara, pour l’honneur qu’il m’a fait en me confiant des responsabilités au plus haut niveau de l’Etat, en qualité de ministre Directeur de Cabinet, puis ministre des Affaires Etrangères. J’ai travaillé à ses côtés en toute loyauté, en prenant toujours soin de lui faire part de mon honnête opinion en toutes circonstances ». C’est en ces termes que Marcel Amon-Tanoh (MAT) a annoncé sa démission du gouvernement au peuple ivoirien, via sa plateforme digitale officielle Facebook. Il prenait ainsi les devants pour officialiser un départ abondamment évoqué depuis plusieurs jours par la presse.
A 68 ans, MAT mettait officiellement un terme à une amitié trentenaire avec Alassane Ouattara. Mais comment en est-on arrivé là ?
Dans les profondeurs de la déchirure
La décision de MAT a été précipitée par la décision du chef de l’Etat de ne pas briguer de troisième mandat et la désignation, le 12 mars, d’Amadou Gon Coulibaly comme candidat du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) lors d’une cérémonie qu’il a préféré boycotter.
Au fait de la volonté du président Ouattara de quitter le pouvoir, MAT s’est mis à rêver d’une émancipation, fort de sa contribution dans la conquête du pouvoir du successeur de Laurent Gbagbo. Les relations entre les deux hommes se sont considérablement dégradées, au point qu’ils ne s’adressaient presque plus la parole depuis le mois de février. MAT reprochait notamment à Alassane Ouattara d’imposer le choix d’Amadou Gon Coulibaly comme candidat du RHDP à la présidentielle d’octobre, et insistait pour que des primaires soient organisées. Raisons pour laquelle il a préféré boycotter le conseil politique du parti, le 12 mars, lors duquel Gon Coulibaly a officiellement été désigné.
Selon des proches, Marcel Amon-Tanoh a déposé sa lettre de démission le 17 mars au matin. La veille, il s’était entretenu en tête-à-tête avec le chef de l’Etat à l’issue d’un Conseil national de sécurité (CSN) consacré à l’épidémie de Covid-19 et lui avait expliqué les raisons de son départ.
Où va MAT ?
Au lendemain de son départ du gouvernement, la question était sur toutes les lèvres en Côte d’Ivoire. Pour avoir combattu à ses côtés pour l’ascension du président Alassane Ouattara, Guillaume Soro, depuis son exil européen, lui a écrit une lettre ouverte.
« Je me rappelle aussi les railleries et les moqueries que tu subissais de la part des grandes familles PDCI qui ne comprenaient pas que toi, le fils bon teint d’un baron du PDCI, tu ailles soutenir ce dernier quand le débat sur sa nationalité faisait rage. Et alors tu me disais : »Guillaume, je connais Ouattara. C’est un homme d’honneur et de parole. Jamais il ne nous fera regretter notre choix. Je le connais, c’est un homme de grande valeur ! Il transformera la Côte d’Ivoire pour le bonheur des ivoiriens ». Et moi je buvais tes mots. Je croyais en ce que tu me disais. Je me dois de te dire aujourd’hui que ces éloges que tu faisais sur Ouattara me permettaient d’argumenter face aux mises en garde de mes compagnons de la gauche !
A la date d’aujourd’hui, penses-tu que nous nous sommes trompés?
Moi je suis perplexe et désorienté tant la métamorphose de l’homme est presqu’irrationnelle!
Mais je suis plutôt impatient de t’entendre sur le sujet », témoigne un Guillaume Soro visiblement déçu d’avoir soutenu Alassane Ouattara, et surtout plein de regrets d’avoir bu les exhortations de MAT.
Aujourd’hui, comme Guillaume Soro qui brûle d’impatience d’entendre MAT sur sa prochaine destination, la Côte d’Ivoire retient son souffle et scrute la plateforme digitale officielle du fils du ministre de l’Education du président Félix Houphouët Boigny.