En dépit des réserves de l’opposition, députés et sénateurs ont adopté le projet de loi portant modification de la Constitution par 246 voix, 2 contre sur 248 votants le 17 mars 2020.
Pour être adopté, le texte soumis aux parlementaires, réunis mardi dernier en congrès à Yamoussoukro, devait être voté par au moins deux tiers des députés et sénateurs ivoiriens. En dépit de l’absence des élus de l’opposition, il y a eu plus que les 230 voix requises. « Il est vrai que les révisions constitutionnelles suscitent méfiance et suspicions, car l’histoire récente de notre pays et celle de bien d’autres ont montré qu’elles ont souvent servi de prétexte pour pérenniser un pouvoir ou pour exclure des adversaires politiques du jeu électoral », avait averti Alassane Ouattara devant les députés et les sénateurs réunis en séance extraordinaire le 5 mars dernier à Yamoussoukro. Le président ivoirien tentait alors de dissiper les appréhensions qui entouraient la modification de loi fondamentale en expliquant qu’il n’était nullement question de prétexte pour pérenniser un pouvoir ou exclure des adversaires politiques du jeu électoral.
La vision d’Alassane Ouattara
« Je veux vous rassurer : le projet de révision de la Constitution que je vous soumettrai ne s’inscrit nullement dans cette optique. Cependant, il est apparu nécessaire d’entreprendre quelques adaptations dans la Constitution de la IIIe République, dans le souci d’améliorer cette constitution et de pérenniser un modèle de fonctionnement de l’exécutif qui a démontré son succès et son efficacité », avait-il poursuivi. Au lendemain du 17 mars, force est de constater que le message du président ivoirien est passé dans les deux chambres majoritairement composées de membres du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Sur 248 votants, 246 ont voté pour, 2 parlementaires ont voté contre, il n’y a eu aucune abstention lors de ce congrès tenu à Yamoussoukro, la capitale politique et administrative ivoirienne.
Le boycott de l’opposition
L’opposition a boycotté le vote à l’Assemblée comme au Sénat. « Nous, opposition, nous sommes contre qu’on touche à une virgule de la Constitution à quelques mois de la présidentielle du 31 octobre 2020 », a affirmé NGoran Djedri du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), ajoutant : « C’est une mascarade. Aucune des règles élémentaires n’a été respectée pour cette modification ».
Pour le camp du président ivoirien, la constitution du 8 novembre 2016 ainsi modifiée, garantit avec ses nouvelles dispositions, un meilleur fonctionnement de l’exécutif, permet la continuité institutionnelle du Parlement, instaure une organisation plus efficace du pouvoir judiciaire et renforce la stabilité politique et institutionnelle en Côte d’Ivoire.
Sur les ailes du coronavirus
En boudant le vote sur la révision constitutionnelle proposée par le président Ouattara, l’opposition ne savait pas que la pandémie du COVID-19 viendrait ajouter une nouvelle couche. Dans un communiqué signé le 19 mars, le ministre, secrétaire général de la présidence de la République de Côte d’Ivoire, Patrick Achi, déclare : « compte tenu de la situation exceptionnelle liée à l’épidémie de la maladie à coronavirus 2019 et des mesures sanitaires urgentes adoptées par le gouvernement pour lutter contre la propagation de cette maladie en Côte d’Ivoire, qui rendent difficile la tenue des réunions parlementaires, le président de la République, vu l’urgence, procèdera à la modification du Code électoral par voie d’ordonnance ». L’élection présidentielle à venir s’annonce plus jamais tendue.