Contre l’ex-chef de la rébellion des Forces nouvelles (FN) et dix-neuf de ses partisans, accusés de « complot », « tentative d’atteinte contre l’autorité de l’État » ainsi que de « diffusion et publication de nouvelles fausses jetant le discrédit sur les institutions et leur fonctionnement, ayant entraîné une atteinte au moral des populations », la cour d’assises d’Abidjan a suivi les réquisitions du parquet. Le 23 juin, Guillaume Soro, en exil depuis deux ans, a été condamné par contumace à une peine de prison à perpétuité pour « atteinte à la sûreté nationale », comme l’avait réclamé Richard Adou, le procureur de la République, une semaine plus tôt. Le tribunal a aussi suivi les réquisitions du parquet pour plusieurs de ses proches collaborateurs.
Son ex-chef du protocole, Souleymane Kamagaté, dit « Soul to Soul », son avocate et ancienne ministre, Affoussiata Bamba Lamine, et son responsable de la communication, Moussa Touré, ont tous écopé d’une peine de vingt ans de prison. Rejetant bruyamment le verdict, l’ancien ministre Alain Lobognon, ainsi que Simon et Rigobert Soro, les frères de Guillaume Soro, ont été condamnés à dix-sept mois de prison ferme pour « trouble à l’ordre public ». Mais ils avaient déjà purgé leur peine. La cour d’assises d’Abidjan a également annoncé la dissolution de Générations et peuples solidaires (GPS), le mouvement politique lancé par Guillaume Soro en juillet 2019. Par ailleurs, la cour a ordonné la confiscation des biens de Guillaume Soro et de ses 19 coprévenus. Elle a également ordonné aux condamnés de payer solidairement un milliard de F à l’Etat ivoirien. Les avocats de l’ancien président de l’Assemblée nationale ont fait appel. Les faits remontent au 23 décembre 2019.
Alors qu’il était à bord d’un avion pour rentrer à Abidjan, les autorités ivoiriennes l’avaient accusé de tentative d’« atteinte à la sûreté de l’Etat » et de « détournement de deniers publics ». Guillaume Soro avait finalement atterri à Accra et plusieurs de ses proches avaient été arrêtés en Côte d’Ivoire. Les autorités avaient basé leurs accusations sur ce qu’elles présentaient comme des enregistrements téléphoniques, dans lesquels Guillaume Soro évoquait ses soutiens au sein de l’armée, se disait « positionné un peu partout » et indiquait avoir la « télécommande » pour passer à l’action. Selon le procureur Richard Adou, des perquisitions avaient aussi permis de saisir une cinquantaine de fusils d’assaut Kalachnikov et des lance-roquettes. Ce verdict intervient au lendemain du retour de Laurent Gbagbo, dans un climat de réconciliation nationale.
Il ouvre d’ailleurs la voie à un mandat d’arrêt international contre Guillaume Soro et sa traduction à la Cour pénale internationale (CPI). Après l’acquittement de Laurent Gbagbo, dix ans après les faits de crime contre l’humanité commis en 2010 et 2011 au cours des violences post-électorales en Côte d’Ivoire, la CPI est en droit de se trouver le véritable coupable. La pression monte autour du processus de réconciliation nationale enclenché par le président Alassane Ouattara. Depuis son retour en Côte d’Ivoire, où il jouit du statut d’ancien chef de l’Etat, Laurent Gbagbo est la cible des familles de victimes qui réclament à cor et à cri que justice soit faite.