« Nous continuerons, professeur. Nous continuerons ce combat pour la liberté et pour la raison dont vous êtes désormais le visage. Parce que nous vous le devons, parce qu’en France, professeur, les Lumières ne s’éteignent jamais », a déclaré Emmanuel Macron dans son hommage à Samuel Paty. Le président français a l’érigé en martyr de la liberté d’expression, « tué précisément parce qu’il incarnait la République ». Entre les statues de Louis Pasteur et de Victor Hugo, Emmanuel Macron ne s’est pas attardé sur le terrorisme islamiste. « Ce soir, je ne parlerai pas du cortège de terroristes, de leurs complices, et de tous les lâches qui ont commis et rendu possible cet attentat. Je ne parlerai pas de ceux qui ont livré son nom aux barbares. Ils ne le méritent pas. De nom, eux n’en ont même plus », a-t-il déclaré.
Pour le président français, « Samuel Paty incarnait ce professeur dont rêvait Jaurès. Celui qui donne à voir ce qu’est la civilisation, celui qui s’était donné pour tâche de faire des républicains ». Au fil de son discours, c’est un hommage au métier des enseignants et au rôle de ces derniers dans la République qu’a déployé Emmanuel Macron. « Vendredi soir, j’ai d’abord cru à la folie aléatoire, à l’arbitraire absurde. Une victime de plus du terrorisme gratuit. Samuel Paty est devenu, vendredi, le visage de la République. De notre volonté de briser les terroristes, de réduire les islamistes», a-t-il poursuivi. Puis, il l’a assuré : « Nous ne renoncerons pas aux caricatures, aux dessins ». Décapité en pleine rue par un terroriste islamiste, qui l’a assassiné pour avoir présenté des caricatures de Mahomet à ses élèves de quatrième, ce professeur d’histoire-géographie a été décoré de la Légion d’honneur à titre posthume.
Plus d’une semaine après l’assassinat barbare de Samuel Paty, près de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), des interrogations perdurent malgré les avancées enregistrées dans les enquêteurs. Trois proches du terroriste ont été mis en examen, soupçonnés d’avoir apporté une aide matérielle à Abdoullakh Anzorov, le meurtrier. Azim E., âgé de 19 ans et ami de longue date d’Abdoullakh Anzorov, est suspecté de l’avoir accompagné la veille des faits dans une coutellerie de Rouen pour l’achat d’un couteau. Une arme retrouvée à proximité du corps du terroriste. Naïm B., âgé de 18 ans, a quant à lui déclaré avoir véhiculé le terroriste à proximité du collège. Enfin, Yussuf C., âgé de 18 ans, est mis en examen du fait de « contacts très rapprochés » avec Abdoullakh Anzorov, et « du partage manifeste de leur idéologie radicale », selon les mots du procureur. Naïm B. et Azim E. ont été mis en examen pour « complicité d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste ». Yussuf C. a lui été mis en examen pour « association de malfaiteurs terroriste en vue de commettre des crimes d’atteintes aux personnes ».
Deux mineurs de 14 et 15 ans, soupçonnés d’avoir reçu de l’argent de la part de l’assaillant, ont été mis en examen pour « complicité d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et remis en liberté sous contrôle judiciaire. Ils sont soupçonnés d’avoir fourni au terroriste, contre de l’argent, des renseignements sur Samuel Paty. L’identification du professeur par l’assaillant « n’a été rendue possible que grâce à l’intervention de collégiens », a affirmé le procureur.
Enfin, Brahim C. et Abdelhakim Sefrioui ont été mis en examen pour « complicité d’assassinat terroriste ». Le premier est le parent d’élève du collège du Bois d’Aulne à l’origine des vidéos diffusés sur les réseaux sociaux et réclamant des sanctions contre le professeur. Dans l’une des vidéos, rapidement devenue virale, il traite notamment le professeur de « voyou ». Il a également donné sur les réseaux sociaux le nom de Samuel Paty et l’adresse du collège. Les enquêteurs antiterroristes s’intéressent aussi à des messages échangés entre ce père de famille et Abdoullakh Anzorov.
Figure de l’islam radical, Abdelhakim Sefrioui s’est rendu au collège pour en rencontrer la principale et se plaindre de Samuel Paty. Il est ensuite apparu dans une vidéo où il se présente comme « membre du Conseil des imams de France ». Il y déclare qu’«Emmanuel Macron a attisé la haine contre les musulmans » et que l’enseignant « est un voyou ». Le procureur antiterroriste établit « un lien de causalité direct » entre les agissements du parent d’élève, et d’Abdelhakim Sefrioui et la mort de l’enseignant.