La justice angolaise a averti qu’elle utiliserait « tous les moyens » pour ramener la milliardaire de 46 ans, après la publication d’une enquête internationale accusant la fille de l’ex-président Jose Eduardo dos Santos d’avoir « siphonné les caisses du pays ».
Baptisée « Luanda Leaks », l’enquête menée par le Consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) avec 36 médias internationaux, révèle les montages financiers opaques mis en place par la fille de l’ex-président angolais José Eduardo dos Santos afin de s’accaparer l’argent de sociétés publiques du pays. Nommée en juin 2016 par son père à la tête de la société pétrolière publique Sonangol, Isabel dos Santos est soupçonnée d’avoir détourné l’argent du contribuable angolais au bénéfice d’une société de Dubaï, Matter Business Solutions DMCC, gérée par son conseiller financier personnel et dont l’actionnaire unique est une amie et associée portugaise de la milliardaire. « En réalité, ce sont 58 millions de dollars qui ont été transférés par Sonangol à Matter quelques heures après le limogeage d’Isabel dos Santos, le 15 novembre 2017, par le nouveau président de l’Angola, Joao Lourenço. Ce jour-là, à 19 heures, elle reçoit par courriel une confirmation de virement vers la société émiratie soupçonnée d’être une de ses caisses noires. Matter et une autre coquille enregistrée à Dubaï, toutes deux liées à Isabel dos Santos, ont ainsi perçu 115 millions de dollars de Sonangol entre mai et novembre 2017 », révèle Luanda Leaks, qui s’appuie sur la fuite de plus de 700 000 documents financiers. Ces documents jettent une lumière crue sur les pratiques corruptives présumées de la jeune milliardaire établie au Portugal, à la tête de plus de 400 sociétés identifiées dans 41 pays.
La position des autorités Angolaises
Face à la récession économique qui frappe l’Angola, le nouveau président, Joao Lourenço a lancé une spectaculaire lutte anticorruption depuis son arrivée au pouvoir en septembre 2017. « Nous utiliserons tous les moyens possibles et nous activerons tous les mécanismes internationaux pour ramener Isabel dos Santos dans le pays », a déclaré lundi le procureur général Helder Pitra Gros à Luanda. Ses services, a-t-il ajouté, ont demandé « le soutien international du Portugal, de Dubaï et d’autres pays » pour obtenir le retour d’Isabel dos Santos qui vit essentiellement entre Londres et Dubaï. En décembre 2019, un tribunal de Luanda a bloqué les comptes bancaires et les avoirs angolais de la fille héritière de l’ancien président.
La justice angolaise la soupçonne d’avoir détourné, avec son époux d’origine congolaise Sindika Dokolo, plus d’un milliard de dollars des entreprises publiques Sonangol, en charge du pétrole, et Endiama, exploitant le diamant, pour nourrir leurs affaires privées. Les intéressés dénoncent une « chasse aux sorcières », destinées à les discréditer.
Isabel dos Santos la « princesse de Luanda »
Proclamée première milliardaire d’Afrique par le magazine américain Forbes en 2013, née à Bakou en 1973 en Union soviétique où son père poursuivait ses études, diplômée en ingénierie de King’s College à Londres à 21 ans, Isabel dos Santos parle six langues et s’essaie très tôt aux affaires en Angola, un pays plongé dans la guerre civile de 1975 à 2002. Outre un restaurant au bord de la plage, à Luanda, elle s’essaye au négoce de diamants, dès le début des années 2000, par le biais d’une société enregistrée à Gibraltar. Sindika Dokolo, son époux et associé, est un homme d’affaires danois d’origine congolaise, héritier d’un empire familial.