Détenu depuis la fin mai dans une prison de haute sécurité du Minnesota, l’ancien policier Derek Chauvin a été libéré mercredi 7 octobre en fin de matinée après le versement d’une caution d’un million de dollars, selon des documents judiciaires. Cette libération conditionnelle a été dénoncée par Ben Crump, l’avocat de la famille de George Floyd, estimant que c’était « un rappel douloureux (…) que justice est encore loin d’être faite ».
En versant une caution d’un million de dollars, Derek Chauvin « a acheté sa liberté après avoir pris la vie de George Floyd pour 20 dollars », a-t-il ajouté sur Twitter. George Floyd, 46 ans, avait été accusé d’avoir utilisé un faux billet dans un magasin.
L’homme blanc de 44 ans devrait être jugé pour meurtre à partir du 8 mars 2021 avec trois de ses anciens collègues, accusés de complicité dans ce drame qui a déclenché la plus grande mobilisation antiraciste aux États-Unis depuis le mouvement des droits civiques dans les années 1960.
Le 25 mai, à Minneapolis, le policier avait été filmé agenouillé pendant plusieurs minutes sur le cou de George Floyd. Alors qu’il était allongé sur le ventre, les mains menottées dans le dos, George Floyd avait plusieurs fois imploré l’agent de desserrer son étreinte, assurant : « Je ne peux pas respirer. » Les images, diffusées en direct sur Internet, avaient suscité une onde de choc mondiale et des manifestations émaillées de violences dans tout le pays. L’arrestation de Derek Chauvin, quatre jours plus tard, avait participé au retour du calme à Minneapolis, grande ville du nord des États-Unis, secouée par plusieurs nuits d’émeutes.
Derek Chauvin risque 40 ans de prison
Depuis la mort de George Floyd, les derniers mots de l’Afro-Américain ont été repris par des millions de personnes qui sont descendues dans les rues du pays pour réclamer des réformes de la police et la fin des inégalités raciales. La ville de Minneapolis, dirigée par un démocrate, a ainsi décidé de transformer sa police accusée d’être « structurellement raciste » pour créer un « nouveau modèle » de sécurité publique.
Le 11 septembre, Derek Chauvin avait comparu devant un juge avec ses coaccusés, Alexander Kueng, Thomas Lane et Tou Thao, qui ont été remis en liberté sous caution depuis plusieurs semaines. L’accusation avait indiqué fin août qu’elle comptait demander des peines exceptionnellement longues pour les ex-policiers, en raison de la cruauté particulière de leur acte et du statut vulnérable de la victime au moment des faits.
Les procureurs n’avaient pas précisé la durée des peines qu’ils comptaient requérir, mais la peine maximale pour meurtre est de 40 ans d’incarcération dans l’État du Minnesota. Les quatre hommes ont, pour leur part, demandé l’abandon des poursuites qui pèsent contre eux, plaidant avoir fait un usage raisonnable de la force face à un homme qui se débattait.
George Floyd est « probablement mort d’une surdose au fentanyl », a assuré l’avocat de Derek Chauvin dans des documents judiciaires. Ces arguments ont suscité la colère de la famille Floyd. « C’est de la folie », avait commenté son neveu Brandon Williams. « Il est mort à cause d’un genou sur son cou, c’est l’autopsie qui le dit », avait ajouté son frère Philonise Floyd avec émotion. Les quatre accusés ont également demandé à être jugés séparément, en dehors de la ville et par des jurés anonymes, en raison selon eux des pressions suscitées par le mouvement de colère.
Trois mois après la mort de George Floyd, l’Amérique était sous le choc d’une autre bavure policière en Aout 2020. La vidéo d’un Noir sur lequel tire un policier blanc déclenche des émeutes et relance les polémiques sur le racisme supposé de la police américaine. Une nouvelle affaire de violences policières contre un suspect noir, grièvement blessé dimanche pendant son interpellation à Kenosha, dans le Wisconsin, a déclenché des émeutes pendant deux nuits consécutives. Trois mois après la mort de George Floyd, et au milieu d’une campagne électorale particulièrement tendue, l’événement relance les polémiques sur le racisme supposé de la police américaine, mais aussi sur la complaisance de certains responsables politiques vis-à-vis des émeutiers. La police de Kenosha avait été appelée dimanche après-midi pour intervenir dans une affaire de violences conjugales, dans un quartier de cette ancienne ville industrielle du Wisconsin.