L’ex-PDG de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, arrêté le 19 novembre 2018 à Tokyo au Japon pour des malversations financières présumées, a fui vers le Liban le 30 décembre 2019.
Depuis le 19 novembre 2018, la vie du Franco-Libano-Brésilien de 65 ans pourrait inspirer plusieurs scénarii hollywoodiens. Autrefois symbole d’une irrésistible ascension chez Renault à travers le développement de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, caractérisée par une aura mondiale, une fascination pour le faste et l’hubris du pouvoir, Carlos Ghosn renvoie désormais l’image d’un fugitif avide de se soustraire à la justice japonaise. « Je ne suis plus l’otage d’un système judiciaire japonais partial où prévaut la présomption de culpabilité, où la discrimination est généralisée et où les droits de l’Homme sont bafoués », a déclaré Carlos Ghosn, le 31 décembre 2019 depuis le Liban. « Le système judiciaire pénal de notre pays dispose de procédures appropriées pour établir la vérité dans des affaires et il est administré correctement, tout en garantissant les droits humains fondamentaux. La fuite d’un accusé sous caution est injustifiable », a déclaré dans un communiqué la ministre japonaise de la Justice, Masako Mori. Comment en est-on arrivé là ?
La fuite vers le Liban
Après 130 jours en prison, le magnat de l’automobile a été libéré sous caution puis assigné à résidence, avec l’interdiction de voir sa femme Carole. Des conditions strictes dénoncées par ses avocats et son entourage. « Les allégations dans les médias selon lesquelles mon épouse Carole et d’autres membres de ma famille auraient joué un rôle dans mon départ du Japon sont fausses et mensongères. C’est moi seul qui ai organisé mon départ. Ma famille n’a joué aucun rôle », a tranché Carlos Ghosn, dont une conférence de presse à Beyrouth la semaine prochaine est très attendue.
Pour l’heure, il est soupçonné de s’être envolé dimanche 29 décembre 2019 de l’aéroport international du Kansai, près d’Osaka au Japon à bord d’un jet privé, puis d’avoir pris un autre vol à Istanbul pour rejoindre aussitôt le Liban. Selon les autorités turques, deux étrangers l’ont assisté dans son itinéraire jusqu’à Istanbul. Après l’interpellation jeudi de sept personnes en Turquie, dont quatre pilotes, cinq d’entre elles ont été placées en détention provisoire.
Ses trois passeports français, brésilien et libanais en consigne chez ses avocats restés au Japon, Carlos Ghosn pourra circuler au Liban avec sa carte d’identité nationale, et un deuxième passeport français qu’il portait dans un étui fermé à clef par un code secret seulement connu de son avocat. La justice japonaise entend toutefois le rattraper.
Un mandat d’arrêt international
Le Liban a reçu une demande d’arrestation d’Interpol pour Carlos Ghosn, a indiqué le 2 janvier le ministre libanais de la Justice Albert Sarhane. Cependant, cette organisation intergouvernementale ne peut contraindre les services chargés de l’application de la loi d’un pays à arrêter une personne faisant l’objet d’une notice rouge. L’absence d’accords de coopération judiciaire entre le Liban et le Japon, joue en faveur de l’ex chef d’entreprise. Les autorités libanaises ont annoncé que Carlos Ghosn était entré « légalement » dans le pays, avec un passeport français et une carte d’identité libanaise, selon une source à la présidence. De son côté, la Sûreté générale a assuré que rien n’imposait « l’adoption de procédures à son encontre » ni « l’exposait à des poursuites judiciaires » au Liban.