Le président égyptien a balayé d’un revers de la main les accusations de corruption portées contre lui par Mohamed Aly, entrepreneur exilé en Espagne.
À peine remise du revers essuyé par la délocalisation d’Egypte de la conférence de l’ONU sur la torture, à la suite d’une vaste polémique accusant l’institution de vouloir « blanchir » le gouvernement égyptien sur ses violations récurrentes des droits de l’homme, revoici l’Egypte au cœur d’un autre scandale, financier cette fois. Le président Abdel Fattah al-Sissi et l’armée sont accusés de corruption par Mohamed Aly, un entrepreneur exilé en Espagne.
Les accusations
À défaut de le faire sur ses terres, l’entrepreneur a utilisé les réseaux sociaux pour déverser sa bile. Dans des vidéos en arabe, Mohamed Aly, exilé en Espagne, affirme que les autorités lui doivent des millions de livres égyptiennes pour des réalisations effectuées par sa compagnie de bâtiment Amlaak Group. « Vous dites que nous (les Egyptiens) sommes très pauvres et qu’on devrait se serrer la ceinture. Vous jetez des milliards », argumente-t-il. Pour lui, le gouvernement a « construit de nombreux projets ratés qui n’ont apporté aucun revenu aux gens ». Il dénonce des «projets orgueilleux» pour lesquels « ils ont pris tout mon argent et aucun d’eux ne m’a versé de compensation ». Au total l’entrepreneur, âgé de 45 ans, revendique la somme de 110 millions d’euros pour la construction d’un hôtel pour l’armée en banlieue du Caire, et la somme de 12 millions d’euros pour la construction de la résidence d’été du président égyptien sur la côte méditerranéenne près d’Alexandrie. Dénudées de preuves, les accusations portées par Mohamed Aly contre le président égyptien et l’armée ont été niées en bloc par Abdel Fattah al-Sissi.
Le président Abdel Fattah al-Sissi et l’armée en phase
Obligé de réagir face à ces vidéos devenues virales sur les réseaux sociaux, le président y est allé de son style militaire. Il a décidé samedi dernier de répondre à ce qu’il juge d’ « allégations mensongères » et ce « en dépit des appels des organes de l’Etat à les ignorer ». S’adressant à l’armée, il poursuit : « votre fils est honnête et fidèle ». De son coté, se refusant à tout commentaire sur les accusations de corruption, le porte-parole de l’armée a récemment affirmé à la télévision que les forces armées supervisaient, sans les diriger, plus de 2 300 projets nationaux, employant quelque cinq millions de civils.
Une armée omniprésente
L’institution militaire détient un empire économique aux activités les plus diverses : des exploitations agricoles aux industries militaires et des productions de consommation courante à la construction d’infrastructures géantes. Son poids dans l’économie du pays varie selon les estimations de 40 % à 80 %. Une part difficile à vérifier étant donné la complexité et l’opacité des structures et des interventions de l’armée dans les affaires. La seule certitude est que son empire ne cesse de s’agrandir. Avec l’arrivée de M. Sissi, ancien chef de l’armée, à la tête de l’Etat égyptien depuis 2013, cette certitude est devenue plus visible encore.
La trahison
Dans un pays où toute critique vis-à-vis du gouvernement est réprimée, les allégations de Mohamed Aly ont déclenché un tir de barrage de la part de soutiens de M. Sissi. Un avocat a notamment déposé plainte contre Mohamed Aly, l’accusant de « trahison ». Par ailleurs, le père de l’entrepreneur est apparu à la télévision, où il a présenté ses excuses.