Depuis plusieurs semaines, le prix du sac de ciment, toutes marques confondues, est passé de 4 600 à 4 800, voire 5 000 F, dans de nombreuses quincailleries au Cameroun. Ceci, apprend-on, en raison d’une révision à la hausse du prix de cession de ce produit aux détaillants. L’information est confirmée dans une « mise en garde » adressée le 29 juin 2021 au directeur général (DG) des Cimenteries du Cameroun (Cimencam), filiale du consortium franco-suisso-marocain LafargeHolcim Maroc Afrique (LHMA), par Luc Magloire Atangana, le ministre du Commerce (Mincommerce). Cette mise en demeure indique clairement, s’agissant du cas précis des produits de Cimencam, qu’au moins une première hausse des prix à l’usine a déjà eu lieu, sans l’accord préalable du gouvernement.
« J’apprends, de différentes sources, que vous vous apprêtez à procéder à une énième augmentation unilatérale de vos prix, au mépris de mes mises en demeure antérieures et de ma main tendue pour une concertation », écrit Luc Magloire Mbarga Atangana. « Je voudrais vous informer, par la présente, que si cette mesure, que je considère comme de la défiance et de la provocation, venait à être mise en exécution, je me verrais dans l’obligation d’ordonner la pose des scellés sur vos installations », poursuit-il. Après cette menace à peine voilée, le Mincommerce rappelle « que le ciment figure toujours parmi les produits soumis à la procédure d’homologation préalable des prix ».
Cette mise en garde au groupe LHMA survient quelques jours seulement après la réception au palais de l’Unité, et la décoration par le président de la République, de l’industriel nigérian Aliko Dangote. En effet, grâce à Dangote Cement Cameroun, qui a lancé ses activités en 2015, l’homme le plus riche d’Afrique a chipé à Cimencam le leadership sur le marché du ciment au Cameroun, dès l’année 2017, après 48 ans de monopole. Cette nouvelle friction entre LHMA et le gouvernement est la deuxième en l’espace d’un an. En effet, alors que depuis le 5 juin 2020, Xavier Saint-Martin Tillet, l’administrateur directeur général (ADG) du groupe LHMA, avait déjà informé le président du conseil d’administration (PCA) de Cimencam, Pierre Moukoko Mbonjo, de son projet de reconduire pour 2 ans le contrat de l’actuel DG de cette filiale, Benoît Galichet, le Cameroun, qui contrôle 43% du capital de Cimencam, s’y était fermement opposé.
A l’origine de cette réticence du gouvernement, des sources proches du dossier avaient évoqué des pratiques peu orthodoxes installées au sein de Cimencam, lesquelles avaient consisté, ces dernières années, à faire exploser les charges de la société, notamment via les importations des matières premières, notamment le clinker et les contrats de consultants avec la Société canadienne d’assistance technique. Toutes choses qui ont contribué à réduire les bénéfices de l’entreprise, tout en expatriant habilement des ressources.