Partie d’un capital social initial de 500 millions de FCFA, la société Mekin Hydroelectric Development Corporation (Hydro-Mekin), créée le 18 octobre 2010 par le président de la République, Paul BIYA, fonctionne aujourd’hui avec 7,5 milliards de FCFA. En dehors du capital social qui a été multiplié par 15 en dix ans, l’entreprise reçoit des subventions de l’Etat venant soit du ministère de l’Économie, de la planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), soit du ministère de l’Eau et de l’Energie (Minee). C’est dire que l’Etat, unique actionnaire, est fondée à en attendre le juste retour de son investissement. Même si cela prend les allures d’un vœu pieu.
Lors de sa création, Hydro-Mekin, a reçu pour missions de concevoir, financer, construire et exploiter la centrale hydroélectrique de Mekin et d’autres aménagements sur le bassin du Dja ainsi que la mise en place des équipements et infrastructures associés, liés à leur exploitation. Fruit de la coopération sino-camerounaise, le barrage de Mekin est financé par Eximbank de Chine à hauteur de 85% du coût du projet soit 25 milliards de FCFA avec 15% de contrepartie camerounaise.
Pourtant des espoirs naissants
Une délégation interministérielle conduite par l’ex Ministre de l’énergie et de l’eau, Basile Atangana Kouna, s’était rendu à Mekin dans la région du Sud, en juillet 2012 pour évaluer les installations qui devront accueillir la cérémonie de la pose de la première pierre du barrage hydroélectrique de Mekin. « Le Cabinet civil nous a instruits de venir à Mekin qui va accueillir la cérémonie de la pose de la première pierre », avait confié Basile Atangana Kouna aux médias camerounais.
Le Ministre de l’énergie et de l’eau et Louis-Paul Motazé, le secrétaire général des services du Premier ministre ont demandé à Hydro-Mekin, le maître d’ouvrage, de changer le site de la tribune présidentielle. « Il faut un site qui permettrait au maître des cérémonies de voir les travaux déjà effectués », avait déclaré le ministre. Selon le ministère de l’Energie et de l’Eau à l’époque, le barrage hydroélectrique de Mékin va permettre la sécurisation de la partie australe du réseau interconnecté SUD dans le cadre d’un fonctionnement de la centrale en réseau interconnecté d’une part, et en réseau séparé d’autre part. Il permettra aussi d’alimenter prioritairement l’ensemble des huit communes du département du Dja et Lobo. A terme, le barrage pourrait assurer l’interconnexion électrique avec les pays voisins du Cameroun. De plus, une usine de pied d’une puissance de 15 MW et une ligne d’évacuation d’énergie de 33 km le long de Mékin, au lieu-dit Ndjom Yekombo (station d’interconnexion au RIS), devaient être construits.
Pour la réalisation de ce pour ce projet, une convention de financement a été signée depuis le 07 janvier 2010 entre les deux parties. Un contrat EPC [« projet clé en main », Ndlr], d’un avait été signé avec l’entreprise China National Electric Engineering Co. Ltd chargée d’exécuter les travaux depuis le 25 octobre 2010.
C’est donc à juste titre que dans son discours d’ouverture du comice agro-pastoral d’Ebolowa, le 17 janvier 2011, Paul Biya annonce : « J’ai aussi décidé de faire démarrer le plus tôt possible les travaux de construction d’un certain nombre d’ouvrages. Il s’agit notamment, vous le savez (…) du barrage hydroélectrique de Mekin ». Selon la documentation officielle, les travaux sont prévus pour 36 mois à compter de fin février 2012. Cette infrastructure est alors le premier projet et « priorité » dans le portefeuille de Hydro-Mekin. Huit ans plus tard, le chantier n’est toujours pas livré.
Entre grève et conditions de travail dénoncées
Le quotidien Le Jour avait annoncé le 3 juin 2013 que les employés ont observé un arrêt de travail entre le 29 et le 31 mai 2013 sur le chantier de construction du barrage hydroélectrique de Mékin, dans la région du Sud au Cameroun. Selon le journal, ce débrayage a été consécutif au limogeage de Bonaventure Nnama, porte-parole des employés, lors de la dernière visite du ministre camerounais du Travail, Grégoire Owona, sur le chantier du barrage. Très incisif dans sa prise de parole, M. Nnama avait dénoncé les conditions de travail sur le chantier révélant que les employés dormaient sur des planches, que ceux-ci ne recevaient pas la paie relative aux heures supplémentaires. M. Nnama avait par ailleurs révélé que l’employé le mieux payé gagnait 200 000 FCFA, alors que le Chinois le moins rémunéré empochait 800 000 FCFA par mois.