Un forum ouvert le 10 Décembre 2019 à Yaoundé sur la contribution de cet outil, à l’initiative du ministère des Finances et du Programme des Nations unies pour le Développement.
Coup d’œil sur l’état des lieux en Afrique
Le système financier africain, en pleine mutation et expansion depuis une vingtaine d’années, doit continuer à se développer pour répondre aux besoins exponentiels des économies africaines. Dominé par les banques conventionnelles, ce système financier s’étoffe notamment grâce aux innovations tel que le mobile banking mais aussi grâce aux nouveaux outils de la finance islamique.
La finance islamique regroupe l’ensemble des produits financiers conformes à la loi islamique, la Charia. A l’heure actuelle, à peine 1,5 % des investissements islamiques mondiaux sont dirigés vers le continent africain. Malgré cette présence encore très faible, cette finance alternative à la finance conventionnelle représente pourtant un espoir pour de nombreux investisseurs du continent. En effet, la croissance démographique galopante pose des défis majeurs au continent. D’après les chiffres de l’Institut National d’Etudes Démographiques (INED), la population du continent devrait s’établir à 3,6 milliards d’habitants en 2100. Les besoins en termes d’infrastructures, d’éducation, d’emploi et donc d’investissements sont donc gigantesques.
Face à de telles exigences, le secteur financier a un rôle primordial à jouer. Son développement et sa capacité à lever des fonds permettront de transformer la manne démographique en atout.
Yaoundé met en évidence sa volonté
C’est l’argent qui manque le moins dans les pays pratiquant de la finance islamique. D’où l’intérêt de ceux qui veulent voir développer leur économie au moyen de cette finance. Cet outil qui promeut une répartition juste et équitable des revenus et de la richesse, basée sur les principes d’interdiction de profit, est au centre d’un forum national qui se tient en ce moment à Yaoundé. C’est une initiative conjointe du Programme des Nations unies pour le Développement et du ministère des Finances dans le cadre du projet d’appui à la résilience économique du Cameroun (Parec). En ouvrant le forum, le ministre des Finances, Louis Paul Motaze a indiqué que cet évènement tient de la volonté du gouvernement de voir le secteur financier poursuivre son développement en diversifiant les produits et services afin de répondre plus précisément aux besoins de l’économie nationale. Et la finance islamique apparaît comme une option très pratique en ce sens qu’elle va aussi contribuer à lutter contre l’exclusion financière.
En effet, à ce jour au Cameroun, seulement une banque (Afriland First Bank), trois établissements de microfinance (Crédit du Sahel, Cecis et Socoopeca- Cmfi) offrent des produits et services islamiques. Ceci grâce à un projet mis en 2005 entre le gouvernement et la Banque islamique de développement dans les régions du Nord, de l’Extrême-Nord et de l’Adamaoua. La banque Afriland First Bank s’y investi aussi. « La finance islamique au Cameroun est dans un état embryonnaire. C’est la raison pour laquelle ce forum vise à sensibiliser les acteurs et à bâtir un plan de développement pour les actions futures», affirme Victor Ndzana Nduga, coordonnateur du programme d’appui à la stratégie nationale de la finance inclusive à nos confrères de Cameroon Tribune. Face à une finance classique qui se porte plutôt bien, mais dont l’accès n’est pas toujours facile pour le plus petit opérateur économique, la finance islamique apparaît comme une solution. Pour Jean- Luc Stalon, représentant résident du Pnud au Cameroun et qui accompagne le Minfi dans son combat pour l’inclusion financière, l’avantage de la finance islamique est qu’elle s’intéresse aux personnes qui n’ont pas toujours accès au service de finance classique notamment les personnes démunies et vulnérables.
Il est à noter que la finance islamique s’appuie sur trois principes fondamentaux. Le premier principe est l’interdiction du riba, du gharar et du maysir qui sont respectivement le taux d’intérêt, l’incertitude et la spéculation. Il est impossible de recourir au taux d’intérêt, toute incertitude dans un contrat est proscrite, et il est interdit de spéculer. Il est enfin interdit de financer les activités considérées illicites (haram) par la Charia (l’alcool, l’industrie du jeu, la pornographie, etc.). Le second principe fondamental est le principe du partage des pertes et des profits entre les contractants. Le lien entre la finance et l’économie réelle est le troisième principe fondamental.