Baba Danpullo réfute le fait qu’il soit insolvable et parle de « spoliation » et « de croisade raciste » contre son groupe Bestinver. Selon le tabloïd spécialisé Investir Au Cameroun, ce dernier a obtenu d’un juge camerounais, la saisie des comptes bancaires de MTN, Broadband Telecom de Collins Mukete, Mobile Money Corporation et Chococam, en vue de recouvrer ce qu’il considère comme des « sommes malicieusement distraites » par son banquier. De son côté, MTN accuse Baba Danpullo de « tentative d’extorsion de fonds ».
En Afrique du Sud, les affaires du milliardaire camerounais Ahmadou Baba Danpullo sont au rouge. Toutes les quatre filiales de sa holding Bestinver, spécialisées dans l’investissement dans l’immobilier, ont été placées en redressement judiciaire le 19 juin 2020 par les tribunaux sud-africains « en vertu de l’article 130 de la loi sur l’insolvabilité ». Il s’agit de Joburg Skyscraper, Bestinverprop, Leopont et Bestinver Company South Africa. La dernière entreprise a même été mise en liquidation quelques mois après.
De sources judiciaires sud-africaines, cette décision a été prise après des demandes de liquidation des sociétés de Bestinver formulées par FirstRand Bank Limited (FRBL), maison-mère de First National Bank (FNB). Cette holding financière, parmi les plus puissantes d’Afrique du Sud, réclamait alors au groupe la somme de 507 millions de rands (plus de 20 milliards de FCFA). D’abord provisoire, le redressement judiciaire devient définitif le 26 octobre 2020, et les administrateurs provisoires sont nommés. Le 18 décembre de la même année, une assemblée des créanciers et actionnaires de la holding du milliardaire camerounais adopte le plan de redressement de trois de ses filiales (Joburg Skyscraper, Bestinverprop, Leopont). Ce document prévoit notamment la vente des actifs de ces entreprises pour apurer le passif.
Aux origines du dilemme financier
Bestinver, qui conteste cette procédure, reconnait néanmoins avoir contracté, entre 2013 et 2017, des prêts auprès de First National Bank (FNB). Il affirme aussi avoir « respecté l’échéancier d’amortissement convenu entre les parties au rythme mensuel de 10 millions de rands (400 millions de FCFA) jusqu’au mois d’avril 2020 ». Mais, alors que le groupe disposait encore de plusieurs années pour honorer ses engagements, affirment ses conseils, FNB a exigé le remboursement « intégral, anticipé et immédiat » du solde des différentes lignes de crédit d’un montant de 550 millions de rands (22 milliards de FCFA), et la signature des documents complémentaires de garantie sans rapport avec le dossier de prêt initial.
Au tribunal, FirstRand Bank Limited raconte une tout autre histoire. On apprend que sa filiale FNB et son client Bestinver sont en tension depuis au moins 2019. Au point où, en mars de cette année-là, la banque, disant craindre que ses créances ne soient compromises, décide d’« accélérer » leur recouvrement. Mais en vain, si l’on en croit une ordonnance (page 17 paragraphe 38) rendue le 24 mars 2021. « Les entreprises (de Bestinver) ont eu du temps pour trouver d’autres financements, afin de rembourser leurs dettes. En décembre 2019, elles n’étaient pas en mesure de le faire. Le 19 décembre 2019, FirstRand Bank a introduit quatre demandes de liquidation distinctes. Celles-ci ont fait l’objet d’une opposition. », lit-on dans le document. Avec la survenu de la pandémie de coronavirus, les choses se dégradent davantage, notamment du fait des confinements imposés par l’Etat sud-africain. Les entreprises de Bestinver sont donc placées en redressement judiciaire malgré les protestations du camp Danpullo. Evoquant souvent des vices de forme, des juges sud-africains rejettent les recours visant à s’opposer à la vente des biens immobiliers appartenant au groupe. A titre d’exemple, dans une décision rendue le 22 septembre 2021, le juge argue du défaut de qualité de la requérante, Yasmina Baba. Selon son ordonnance, la fille du milliardaire camerounais s’est d’abord présentée comme actionnaire avant de reconnaitre que son lien avec Bestinver n’est que « familial ».
Dans une requête adressée le 31 août 2022 au président du tribunal de première instance de Bonanjo à Douala, Quentin Djapite Ndoumbe, Bestinver accuse FNB d’avoir « spolié la totalité des actifs immobiliers appartenant aux sociétés requérantes (Bestinver Company Joburg Skyscraper, Bestinverprop et Bestinver Cameroun), aidé en cela par ses complices à savoir les liquidateurs désignés et la justice sud-africaine ». Le groupe contrôlé par Baba Danpullo chiffre ces actifs à 5 milliards de rands (200 milliards de FCFA). En plus de cette somme, il réclame le paiement de 23,8 milliards de FCFA au titre de « loyers indument perçu (21,6 milliards) » et de « frais de recouvrement (2,2 milliards) », de même que des intérêts au taux de 3,25%. MTN Cameroon et CHOCOCAM dont les comptes sont bloqués depuis des mois, ont tout fait de condamner ces procédures qu’elles jugent arbitraires et non conformes au droit OHADA et d’autres dispositifs judiciaires.