La nouvelle tombe et sonne plutôt comme une blague de mauvais goût, étant donné qu’il y a quelques semaines, une telle rumeur animait la toile. Mais cette fois ci c’est officiel, Jacob Desvarieux est bel et bien passé de vie à trépas. Une triste nouvelle que les mélomanes à travers le monde ont du mal à avaler. Le leader du groupe Kassav menait un combat contre la mort depuis son hospitalisation le 12 juillet 2021 au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. Positif au coronavirus, diabétique l’artiste zouk avait été placé dans un coma artificiel, suite à une greffe rénale. Agé de 65 ans, le très célèbre guitariste et arrangeur pousse son dernier souffle. Jacob Desvarieux quitte la scène après un passage non pas des moindres.
Musicien, chanteur, auteur compositeur, le leader du groupe Kassav est né le 21 novembre 1955 à Paris en France. Jacob Desvarieux reçoit sa toute première guitare des mains de sa mère à dix ans durant leur séjour au Sénégal. Un présent auquel le petit Jacob va entièrement se consacrer jusqu’à devenir musicien professionnel à l’âge de 16 ans seulement.
De retour en France, Desvarieux rencontre des copains avec qui il met sur pied à Marseille « The Bad Grass », un groupe de rock. Celui-ci deviendra « Sweet Bananas » pour des raisons commerciales. Leur titre « Bilboa dance » qui a du succès dans les bacs est utilisé comme générique d’une émission matinale de jeu sur RMC. Quelques temps après, en compagnie du camerounais Jacques Douglas Mbida, ils fondent le « Zulu Gang » qui n’a pas fait long feu. De retour sur Paris, Jacob fait la rencontre de Pierre-Edouard Décimus, bassiste antillais qui venait de quitter le Vikings de la Guadeloupe, en plein montage du projet Kassav. En compagnie de Freddy Marshall et de Georges Décimus, ledit projet se concrétise avec la sortie du premier album « Love an Ka dance » en 1979. Dès lors, les tubes à succès s’enchaînent parmi lesquels « Zouk la sé sèl médikaman nou ni », un titre aux sonorités typiques qui va faire la renommée du groupe à l’échelle mondiale.
Une source de créativité
De par son grand potentiel et son immense créativité, Jacob Desvarieux va beaucoup contribuer au rayonnement de Kassav. Avec un rythme nouveau, le zouk. Un genre musical englobant les rythmes de la Caraïbe. Un mélange de gwoka, kompa, bèlè, chouval bwa et calypso, le zouk se veut avant tout une affirmation de l’identité antillaise. De plus, cette sonorité est considérée comme tout un symbole pour la Guadeloupe et la Martinique. Le zouk se montre également comme une musique engagée. Des chansons comme « Gorée », « An ba chen la » ou « Réhabilitation » sont l’expression des frustrations et des injustices subies par le peuple antillais, douloureusement arraché à l’Afrique durant l’esclavage. Jacob Desvarieux expliquait souvent que le zouk devait servir de pont entre ce continent et les Antilles. Raison pour laquelle des airs de basse du makossa transparaissent dans des titres comme « Ou pa ka sav » ou « Mwen di ou awa ». Sans oublier des interventions en langue ewondo de Jacques Douglas Mbida dans des chansons comme « Gorée ».
De par ses sonorités à la fois atypiques et entraînantes, le zouk a pris une ampleur globale en devenant une véritable poudre de d’or, qui berce les mélomanes de la planète entière.
Au-delà des Antilles Jacob Desvarieux passait beaucoup de temps en Afrique où il séjournait souvent. Plusieurs musiques du continent ont été marquées de l’empreinte du doigté de l’artiste. Bête de la scène, grâce à sa voix chaude et sa rythmique, Jacob Desvarieux mettait les mélomanes d’accord de par la qualité de ce qu’il offrait comme performance. Leader charismatique et incontesté depuis le départ en 1985 de Pierre-Edouard Décimus, Jacob Desvarieux était devenu le véritable pilier de Kassav.
Des Obsèques en première
Diffusées en direct sur la 1ère, chaîne de Guadeloupe, les obsèques de la star du groove mythique ont ému plus d’un. La foule s’est réunie à l’extérieur des pompes funèbres et sur l’allée du cimetière Saint-François pour rendre un dernier hommage à celui qui les a fait danser durant plusieurs décennies. Après l’office religieux et les hommages de la famille et des amis dont Jean Pierre Coquerel, l’un des pères du groupe ; Jacob Desvarieux a été accompagné vers sa dernière demeure comme il a vécu, en musique. Son cercueil a défilé au rythme de la chanson « Kavalié O Dam » du groupe Kassav, sortie en 1984.